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Changements dans le contexte organisationnel et la communication entre les acteurs suite à l'implantation d'intranet

Changes in the organizational context and the communication between actors following the implementation of intranet

Abstracts

Dans cette étude exploratoire et comparative de deux compagnies provenant des industries du logiciel et manufacturière des composantes électroniques nous examinons, à l'aide de plusieurs modèles théoriques de la technologie, les diverses relations qui s'établissent entre intranet et les acteurs sociaux. Trois groupes de résultats se dégagent de nos analyses de cas. D'abord, tel que prédit par le modèle de « l'impératif technologique », nous observons qu'intranet exerce un impact sur plusieurs aspects structurels des contextes organisationnels étudiés. Ensuite, nous corroborons le modèle du « choix stratégique », en démontrant qu'intranet est un construit social qui est créé, utilisé et modifié par les actions de signification des acteurs humains. Enfin, en nous appuyant sur le modèle structurationniste d'intranet, nous remarquons que plusieurs dimensions de la communication entre les acteurs sociaux subissent des changements significatifs comme résultat de l'interaction de nature dialectique, structurante et continuelle qui s'établit entre intranet et ses usagers. Cependant, même si les changements observés se produisent dans les deux compagnies de l'échantillon, la quantité, le degré et l'intensité des modifications survenues varient dépendamment du contexte organisationnel spécifique à l'entreprise analysée et du type d'industrie dans laquelle elle opère.

intranet; modèle structurationniste; contexte organisationnel; communication


This exploratory and comparative study of two companies examines, based on multiple theoretical models of technology, the diverse relationships that develop between the Intranet and social actors. One of the analyzed companies operates in the software industry, while the other manufactures electronic components. Our research findings are threefold. Firstly, as suggested by the "technological imperative" model, we notice that the Intranet impacts several structural aspects in the organizational contexts under investigation. Secondly, we support the "strategic choice" model, which shows that the Intranet is a social construct that is created, used and changed by the human actors' meaningful actions. Finally, based on the structurationalmodel of Intranet, we observe that several dimensions of communication between the social actors are significantly modified as a result of the dialectical, structurational and continuous interaction that is established between the Intranet and its users. However, although the observed changes take place within the two sample companies, the quantity, the level and intensity of the changes vary according to the organizational context, which is typical of the analyzed company, and the type of industry in which the company operates.

intranet; structurational model; organizational context; communication


Changements dans le contexte organisationnel et la communication entre les acteurs suite à l'implantation d'intranet

Changes in the organizational context and the communication between actors following the implementation of intranet

Martin Spraggon; Virginia Bodolica

American University of Sharjah

Address for correspondence Address for correspondence: Martin Spraggon Ph.D.American University of Sharjah School of Business and Management Department of Management, Marketing and Public Administration P.O. Box 26666 Sharjah, United Arab Emirates Tel: +(971) 6 515-2585 Fax: +(971) 6 558 5065 E-mail: martin.spraggon-hernandez@hec.ca

RÉSUMÉ

Dans cette étude exploratoire et comparative de deux compagnies provenant des industries du logiciel et manufacturière des composantes électroniques nous examinons, à l'aide de plusieurs modèles théoriques de la technologie, les diverses relations qui s'établissent entre intranet et les acteurs sociaux. Trois groupes de résultats se dégagent de nos analyses de cas. D'abord, tel que prédit par le modèle de « l'impératif technologique », nous observons qu'intranet exerce un impact sur plusieurs aspects structurels des contextes organisationnels étudiés. Ensuite, nous corroborons le modèle du « choix stratégique », en démontrant qu'intranet est un construit social qui est créé, utilisé et modifié par les actions de signification des acteurs humains. Enfin, en nous appuyant sur le modèle structurationniste d'intranet, nous remarquons que plusieurs dimensions de la communication entre les acteurs sociaux subissent des changements significatifs comme résultat de l'interaction de nature dialectique, structurante et continuelle qui s'établit entre intranet et ses usagers. Cependant, même si les changements observés se produisent dans les deux compagnies de l'échantillon, la quantité, le degré et l'intensité des modifications survenues varient dépendamment du contexte organisationnel spécifique à l'entreprise analysée et du type d'industrie dans laquelle elle opère.

Mots clés: intranet, modèle structurationniste, contexte organisationnel, communication

ABSTRACT

This exploratory and comparative study of two companies examines, based on multiple theoretical models of technology, the diverse relationships that develop between the Intranet and social actors. One of the analyzed companies operates in the software industry, while the other manufactures electronic components. Our research findings are threefold. Firstly, as suggested by the "technological imperative" model, we notice that the Intranet impacts several structural aspects in the organizational contexts under investigation. Secondly, we support the "strategic choice" model, which shows that the Intranet is a social construct that is created, used and changed by the human actors' meaningful actions. Finally, based on the structurationalmodel of Intranet, we observe that several dimensions of communication between the social actors are significantly modified as a result of the dialectical, structurational and continuous interaction that is established between the Intranet and its users. However, although the observed changes take place within the two sample companies, the quantity, the level and intensity of the changes vary according to the organizational context, which is typical of the analyzed company, and the type of industry in which the company operates.

Keywords: intranet, structurational model, organizational context, communication

MISE EN CONTEXTE

Au début des années 90 nous étions les témoins du commencement d'une nouvelle ère sociétale caractérisée par le passage de l'économie industrielle à l'économie basée sur le savoir (Drucker, 1993). En effet, il y a plus d'une vingtaine d'années le succès managérial et organisationnel était déterminé par les capacités de production des entreprises, qui s'appuyaient significativement sur une seule et plus importante ressource tangible - le capital. Cependant, les profondes transformations qu'a connues l'économie mondiale accompagnées du développement exponentiel des technologies de l'information, ont mis de l'avant le besoin de posséder et de gérer efficacement une nouvelle ressource organisationnelle à caractère intangible - les connaissances. La gestion stratégique des connaissances est ainsi devenue une des plus importantes préoccupations pour les gestionnaires qui veulent développer un avantage compétitif durable (Nonaka et Teece, 2001).

L'économie basée sur le savoir ou les connaissances implique des dynamiques d'affaires très différentes de celles qui existaient auparavant. Elle reflète l'émergence des modes de pensée, d'action et de gestion spécifiques qui sont nécessaires pour faire face aux nouvelles réalités économiques, sociales et technologiques. Dans ce contexte de changements structurels, les stratégies de gestion des connaissances reliées aux technologies de l'information occupent une place de priorité. Elles permettent aux entreprises d'organiser des quantités extraordinaires de données de sorte que ces dernières puissent être transformées en connaissances utiles et partageables entre les différents membres de l'organisation. Parmi une vaste variété des technologies d'information, intranet est un outil qui a été développé et mis en place avec succès par plusieurs entités économiques à travers le monde (Edenius et Borgerson, 2003).

Une multitude de travaux empiriques ont été effectués jusqu'au aujourd'hui pour étudier le rôle stratégique que jouent les différents outils informatiques dans les organisations. À partir d'une analyse approfondie du champ disciplinaire des technologies de l'information, deux courants de recherche peuvent être démarqués. Le premier courant, qui s'est développé dans les années 80 et a dominé le champ pendant la dernière décennie du vingtième siècle, examine toutes les technologies dans leur ensemble, en explorant les diverses relations qui peuvent être tissées entre ces technologies et les organisations. La plupart de chercheurs ont utilisé le modèle de « l'impératif technologique » pour expliquer les changements qui apparaissent dans les entreprises suite à l'implantation des nouvelles technologies (Markus, 1983 ; Markus et Robey, 1988), ou encore le modèle du « choix stratégique » afin de mettre en lumière l'influence que les acteurs humains exercent sur ces technologies, quelles que soient leurs caractéristiques distinctives (Davis et Taylor, 1986 ; Lea et al., 1995).

Ultérieurement, plusieurs adeptes de ce courant se sont appuyés sur le modèle structurationniste pour explorer comment les interactions mutuelles qui se produisent entre les technologies de l'information et leurs usagers affectent un type particulier d'organisation. Tel est le cas, par exemple, des hôpitaux examinés dans l'article de Barley (1986) et des multinationales de consultation analysées par Orlikowski (1992). Cependant et en dépit des apports significatifs fournis, la portée des travaux qui s'inscrivent dans ce premier courant de recherche est limitée, principalement pour les deux raisons suivantes. D'abord, la variable « technologie » est très largement définie et fait référence à plusieurs outils technologiques à la fois, ne permettant pas de dégager les spécificités d'utilisation d'un outil en particulier (ex. intranet). De plus, aussi longtemps que les études existantes se concentrent sur quelques industries seulement, leurs trouvailles sont difficilement généralisables ou transférables aux entreprises opérant dans d'autres industries qui n'ont pas été explorées jusqu'à date.

Le deuxième courant de recherche, qui a vu le jour au début du vingt-unième siècle, se distingue par son intérêt prononcé accordé à une technologie spécifique, intranet, et se penche sur l'exploration d'une multitude de questions reliées à cette technologie. Parmi ces questions on retrouve, entre autres, l'analyse des différentes utilisations réelles et potentielles d'intranet par ses usagers (Denton, 2007 ; Mphidi et Snyman, 2004), l'évaluation de l'efficacité d'intranet corporatif à travers un cadre conceptuel multidimensionnel (Masrek et al., 2007) et le changement organisationnel véhiculé par intranet et le courrier électronique examiné à l'aide de l'approche ethnographique (Cecez-Kecmanovic et al., 1999). Néanmoins, même si leurs contributions sont importantes, plusieurs limites qui caractérisent ces travaux doivent encore être surmontées. Dans un premier lieu, la grande majorité des études de ce courant est de nature théorique, se concentrant sur l'analyse des différentes fonctionnalités et applications techniques d'intranet. Ensuite, étant donnée la multitude de façons dont intranet est défini par les auteurs de ces recherches, la diversité conceptuelle relative à intranet ne permet pas de comparer les résultats obtenus. Finalement, les études de nature comparative sont peu nombreuses et, de manière générale, elles décrivent les expériences reliées à intranet au sein des organisations opérant dans la même industrie, telles les compagnies de haute technologie (Wagner et al., 2002) ou les librairies académiques (Mphidi et Snyman, 2004).

Dans cet article empirique nous poursuivons trois objectifs différents. D'abord, nous visons à combler les lacunes identifiées dans les travaux empiriques existants afin de pouvoir contribuer à l'avancement des connaissances dans notre domaine d'intérêt. Ensuite, nous voulons peaufiner le modèle structurationniste d'implantation d'intranet que nous avons bâti dans une étude antérieure qui porte sur trois compagnies différentes opérant dans l'industrie des jeux électroniques, des voyages corporatifs et des télécommunications (Spraggon et Bodolica, 2006). Finalement, nous nous proposons de vérifier l'applicabilité de ce cadre conceptuel structurationniste à d'autres entreprises activant dans diverses industries qui n'ont pas été explorées jusqu'à maintenant. De cette façon, nous pourrons estimer la généralité des résultats de notre recherche empirique antérieure à d'autres contextes organisationnels et industriels.

Pour atteindre ces objectifs, nous visons répondre aux trois questions de recherche suivantes :

(1) Comment intranet affecte-il les différentes dimensions du contexte organisationnel?

(2) Quelles sont les significations que les acteurs humains développent par rapport à intranet ?

(3) Comment la relation bidirectionnelle qui se crée entre intranet et ses usagers affecte la communication entre les acteurs humains au sein d'une organisation ?

Afin de trouver des réponses à ces questions, nous avons effectué une analyse qualitative et comparative entre deux entreprises canadiennes des industries du développement du logiciel et manufacturière de composantes électroniques. Trois groupes de résultats se dégagent de notre étude :

(1) Intranet provoque plusieurs changements dans le contexte organisationnel des entreprises explorées (par exemple, dans la distribution du pouvoir, la rapidité de prise de décisions, le travail d'équipe, etc.), tel que prédit par les postulats de l'approche de « l'impératif technologique ».

(2) Les acteurs humains développent diverses significations par rapport à intranet, fait qui influence significativement le niveau d'acceptation et d'intégration dans les opérations quotidiennes de la technologie en question. Le modèle du « choix stratégique » permet d'expliquer et de mieux comprendre ce phénomène.

(3) Plus les significations des acteurs par rapport à intranet sont positives et le niveau d'acceptation et d'intégration est élevé, plus intranet en tant que technologie « objective » facilite et contraint certaines actions des usagers relatives aux procédures d'utilisation et aux comportements des acteurs. Comme résultat de cette interaction mutuelle entre intranet et ses usagers et à travers la nature à la fois faciliteuse et contraignante d'intranet, tel que suggéré par la théorie structurationniste, les diverses dimensions de la communication entre les acteurs humains subissent des changements significatifs.

Cependant, même si tous les changements identifiés précédemment se produisent dans les deux compagnies étudiées, la quantité, le degré et l'intensité des modifications apparues varient dépendamment du contexte organisationnel spécifique à l'entreprise analysée et du type d'industrie dans laquelle elle opère.

Notre argumentaire dans cet article est organisé autour des axes suivants. Premièrement, nous définissons le concept d'intranet et résumons les résultats des études empiriques précédentes qui ont exploré le lien entre l'organisation et les technologies de l'information, en mettant de l'avant les perspectives théoriques adoptées dans ces études. Deuxièmement, nous passons en revue les fondements de notre modèle structurationniste d'intranet et expliquons en détails la démarche méthodologique poursuivie. Troisièmement, nous présentons les trouvailles de notre recherche, en préservant une approche comparative entre les deux entreprises analysées et en discutant comment nos résultats se situent par rapport à la littérature spécialisée existante. Dernièrement, nous commentons les contributions et les limites de notre article.

REVUE DE LITTÉRATURE

Définition d'intranet

Il est actuellement difficile de trouver une définition unanime de ce que représente intranet. Cette application informatisée peut prendre plusieurs formes, dépendamment des besoins de l'organisation et de ses membres. Par exemple, Spraggon et Bodolica (2006) ont découvert au moins dix utilisations différentes d'intranet au sein d'une compagnie de télécommunications implantée au Canada. Selon les dires des employés de cette organisation, intranet permet de : (a) partager l'information avec les responsables situés aux différents échelons hiérarchiques ; (b) gérer les connaissances ; (c) faciliter la communication à l'interne ; (d) naviguer à la recherche de solutions aux problèmes posés ; (e) partager les applications techniques (outils collaboratifs) avec d'autres membres de l'organisation ; (f) gérer efficacement les projets; (g) développer les compétences des employés ; (h) fournir un support technique au service des ressources humaines ; (i) contrôler les opérations internes ; et (j) bâtir la mémoire organisationnelle. Dans le même ordre d'idées, Merck et al. (2002) suggèrent qu'il existe une grande variété d'intranets corporatifs et proposent une classification intéressante : des intranets de communication ; des intranets de collaboration ; des intranets d'information ; et des intranets d'application.

Étant donné les différentes fonctionnalités et possibilités qu'offre intranet, la littérature spécialisée propose des définitions très variées de cette technologie. Par exemple, certains auteurs préfèrent souligner les dimensions techniques d'intranet. Ainsi, selon Wagner et al. (2002), « an intranet is a private network of computers that communicate using TCP/IP [Transmission Control Protocol/Internet Protocol] to run Internet applications like Telnet, FTP, and HTTP ». Mueller (2002) va dans la même direction, en affirmant qu'intranet est « a private TCP/IP network that usually supports the same protocols and services as the public Internet including emails, news, chat rooms and web pages ». D'autres auteurs fournissent des définitions axées sur les différents usages et applications d'intranet. Tel est le cas de Mphidi et Snyman (2004) qui voient intranet comme « a network that uses Internet concepts and technologies within an organization in order to be accessed by employees to share knowledge », ou encore de Kim (2003) qui définit intranet comme un outil technologique « that offers new ways to manage and communicate data, information and knowledge ».

À notre avis, quelle que soit la définition d'intranet que les chercheurs privilégient, il devrait y avoir un terrain d'entente sur les trois aspects suivants. (a) Intranet est un outil technologique, (b) qui est réservé à l'usage unique des membres d'une organisation et (c) qui permet d'entreposer une grande quantité de données. Pour les fins de cette étude, nous définissons intranet comme suit : c'est un réseau fermé destiné aux utilisateurs identifiables de l'entreprise, qui permet de digitaliser l'information privilégiée et la rendre accessible aux destinataires cibles de façon sécuritaire et sans contraintes de temps et d'espace, favorisant la création d'un contexte de travail de collaboration et stimulant une communication transversale au-delà des limites hiérarchiques posées par la structure formelle de l'organisation.

Approches théoriques

Markus et Robey (1988) et Orlikowski (1992) identifient trois perspectives théoriques fondamentales qui ont été utilisées par les chercheurs du domaine pour explorer le rôle des technologies dans les organisations. Il s'agit des modèles de « l'impératif technologique », du « choix stratégique » et celui structurationniste. Le premier modèle, aussi appelé déterministe, conçoit la technologie comme étant une variable de nature exogène et indépendante qui exerce un impact direct, unidirectionnel et mesurable sur les différentes dimensions de l'organisation. Parmi ces dimensions Barley (1990) cite l'étendu du contrôle, la centralisation du pouvoir et la formalisation des règles et des procédures. Dans ce contexte, les actions des acteurs humains ne découlent pas d'un choix conscient et planifié, mais représentent plutôt le résultat des contraintes et des forces externes sur lesquelles ces acteurs ont peu de contrôle (Markus et Robey, 1988). L'avènement d'une nouvelle technologie au sein d'une entreprise déclenche des changements significatifs, parfois qualifiés de dramatiques, dans la structure organisationnelle et la nature des emplois managériaux (Simon, 1977).

Dans son article, Barley (1990) met en lumière plusieurs limites du modèle de « l'impératif technologique ». D'après lui, ce dernier repose sur une ontologie matérialiste qui a de la difficulté à expliquer pourquoi des technologies similaires ont des impacts différents sur les organisations et pourquoi des compagnies similaires implantent des outils technologiques divergents. De plus, les actions, les interprétations et les intentions des personnes qui conçoivent, achètent et utilisent les technologies sont ignorées lors des analyses qui s'appuient sur cette approche théorique (Barley, 1986). Afin d'acquérir une compréhension plus complète des relations entre les technologies et les organisations, cet auteur propose de prendre en considération les dynamiques sociales et les actions des acteurs humains.

Le modèle du « choix stratégique », contrairement au modèle précédent, accorde une place de priorité à l'être humain dans l'influence qu'il exerce sur la technologie et ses caractéristiques. En d'autres termes, comme c'est l'acteur humain qui va concevoir, implanter et approprier l'outil technologique, ce dernier devient une variable fortement dépendante de la volonté des acteurs sociaux (Perrow, 1983 ; Davis et Taylor, 1986 ; Zuboff, 1988). Plusieurs auteurs se sont inspirés des postulats de base de cette approche théorique pour mener leurs travaux de recherche. Parmi eux on retrouve les études sur l'innovation technologique comme construit social avec, d'une part, l'approche socio-constructiviste (Pinch et Bijker, 1984 ; 1986) dans laquelle les objets techniques sont façonnés par le lieu d'interaction qui se déroule entre divers groupes sociaux, et d'autre part, le courant du Centre de sociologie des innovations de l'école des Mines (Latour, 1987 ; Callon, 1991) qui s'intéresse à la nature des interactions sociales dont les technologies font l'objet. Ainsi, la technologie en tant que produit de l'action sociale intègre toutes les représentations et les significations qui sont négociées par et entre les acteurs humains. Même si les contributions du modèle du « choix stratégique » sont indéniables, il reste néanmoins qu'il se situe à l'extrémité opposée du continuum « technologie - acteurs humains » en accordant un pouvoir exagéré aux êtres sociaux. En effet, comme le souligne Barley (1986), les actions humaines sont aussi façonnées et influencées par des forces externes qui se trouvent au-delà du contrôle des acteurs sociaux.

La théorie structurationniste permet de franchir les limites des théories précédentes, en apportant une vision à la fois objective et subjective de la technologie dans les organisations. Cette intégration des notions fonctionnalistes et phénoménologiques se retrouve dans la théorie structurationniste de Giddens (1979) qui permet de saisir et de comprendre la dualité de la technologie. Selon Orlikowski (1992), cette dualité s'explique de manière suivante. Les artefacts techniques ont un impact direct sur le contexte organisationnel et sur les actions et les comportements des acteurs sociaux, et en même temps, ces artefacts sont créés, appropriés et manipulés par les acteurs humains. Autrement dit, la technologie devient à la fois un produit et un moyen contraignant-facilitant des actions intelligibles des acteurs sociaux. Le modèle structurationniste présuppose une relation dialectique, bidirectionnelle et ininterrompue entre les acteurs humains et la technologie qui s'influencent et se façonnent mutuellement. Les outils technologiques imposent des règles et offrent des ressources que les acteurs utilisent dans leurs actions et interactions, et en retour, ces outils sont récréés par ces mêmes actions.

Études sur intranet

Traditionnellement, la grande majorité de chercheurs a préféré analyser les relations entre les outils techniques et les organisations, sans se concentrer sur un type particulier de technologie. Tel est le cas, par exemple, des études de DeSanctis et Poole (1994) qui examinent le rôle que la technologie joue dans le changement organisationnel et de Griffith (1999) qui utilise l'approche structurationniste pour décrire les significations et les représentations que les usagers d'une organisation créent par rapport aux objets techniques. Cependant, depuis quelques années, on remarque un intérêt grandissant de la part des praticiens et théoriciens pour les recherches portant sur intranet.

Ainsi, Mhidi et Snyman (2004) explorent les façons dont lesquelles intranet est utilisé en tant qu'outil de gestion de connaissances dans le contexte de trois librairies académiques d'Afrique du Sud. Leurs résultats suggèrent que l'utilisation d'intranet permet à ces librairies de gérer plus efficacement leurs connaissances, d'améliorer la qualité de leurs services et de créer et de maintenir une culture d'apprentissage. Damsgaard et Scheepers (2000) proposent un modèle en étapes qui permet aux organisations de faire face aux situations de crise lors de l'implantation d'intranet. Afin d'assurer l'institutionnalisation d'intranet, ces auteurs affirment que trois crises existentielles doivent être surmontées. D'abord, si l'initiateur d'intranet ne le promeut pas continuellement, il ne se développera pas au-delà de sa phase expérimentale. Puis, si la masse critique d'usagers et de contenu entreposé sur intranet n'est pas atteinte simultanément, intranet n'évoluera pas au sein de l'organisation. Finalement, si intranet demeure hors contrôle, son utilité sera remise en question par ses usagers et il sera ensuite abandonné.

Récemment, Masrek et al. (2007) bâtissent un cadre conceptuel qui tente de mesurer l'efficacité d'intranets corporatifs. Ce cadre mobilise trois variables différentes, à savoir, l'usage effectif d'intranet (ex. support aux décisions, intégration du travail), la qualité du service (ex. empathie, fidélité, ressources tangibles, etc.) et l'impact sur l'usager (ex. productivité et innovation des tâches, accomplissement personnel). De plus, trois groupes de facteurs antécédents de type organisationnel, technologique et individuel sont identifiés et leurs impacts sur l'usage effectif et la qualité de service d'intranet sont examinés. Dans leur article qualitatif, Wagner et al. (2002) décrivent deux méthodes différentes d'implantation d'intranets corporatifs et leurs impacts sur l'organisation. Ces chercheurs concluent qu'indépendamment de la méthode employée, plusieurs aspects doivent être pris en considération pour rendre intranet plus utile. Globalement, il s'agit de définir les objectifs d'implantation, d'assurer la sécurité informatique et la confidentialité des données et d'offrir des sessions de formation aux usagers d'intranet.

Après avoir effectué une analyse exhaustive de la littérature portant sur intranet, nous constatons que la grande majorité des travaux se concentre sur les différentes utilisations et fonctionnalités techniques d'intranet. Plus loin, la plupart de ces travaux empruntent soit le modèle de « l'impératif technologique » comme cadre privilégié de référence, soit la perspective du « choix stratégique » pour analyser les significations que développent les usagers face à intranet. À notre connaissance, peu de recherches ont été effectuées sur intranet en utilisant une approche structurationniste.

CADRE STRUCTURATIONNISTE D'INTRANET

Dans une étude antérieure, Spraggon et Bodolica (2006) ont développé un cadre d'analyse structurationniste d'implantation d'intranet pour examiner les relations entre les acteurs humains et intranet dans trois organisations différentes. Le but de notre article est de réviser et de raffiner le cadre d'analyse proposé précédemment, en l'appliquant aux deux études de cas de compagnies opérant dans des industries différentes. Le modèle structurationniste d'intranet peaufiné et proposé ci-dessous identifie plusieurs variables de recherche et met en lumière les liens attendus entre ces variables. Il nous servira de cadre de référence tout au long de cet article pour que nous puissions répondre à nos questions de recherche et présenter nos analyses de façon structurée. Notre nouveau modèle conceptuel est présenté schématiquement dans la Figure 1, tandis que les relations établies entre les différentes variables sont explicitées dans le Tableau 1. Pour atteindre les objectifs de cette étude, nous nous sommes posés les trois questions de recherche suivantes :


(1) Comment intranet affecte-il les différentes dimensions du contexte organisationnel? [voir la relation (1), Figure 1]

Afin de répondre à cette première question de recherche, nous nous appuyons sur les postulats de base du modèle de « l'impératif technologique ». Notre question présuppose qu'intranet exerce un impact direct et unidirectionnel sur le contexte organisationnel. Selon la littérature spécialisée (Simon, 1977 ; Pfeffer, 1982), nous nous attendons à ce qu'intranet génère des changements significatifs au sein des organisations étudiées, qui n'étaient pas présents avant l'arrivée de cette technologie. Pour les fins de notre étude, le contexte organisationnel est définit comme un ensemble de variables qui permet d'illustrer de façon holistique certains aspects structurels et dynamiques de gestion qui différencient une compagnie d'une autre. Les douze facteurs qui composent le contexte organisationnel et qui ont été retenus dans cet article sont les suivants : l'industrie ; le nombre d'employés ; le type de structure ; le niveau hiérarchique ; la culture organisationnelle ; le nombre de départements ; la distribution du pouvoir ; la rapidité de prise de décisions ; le style de management ; le travail d'équipe (inter- et intra-équipe) ; le degré de formalisation ; et l'aménagement intérieur.

(2) Quelles sont les significations que les acteurs humains développent par rapport à intranet ? [voir la relation (2), Figure 1]

À notre avis, le modèle du « choix stratégique » s'avère le plus adéquat pour répondre à cette question de nature plutôt subjective. En effet, comme prédisent les adeptes de ce courant (Pinch et Bijker, 1986), intranet est une construit social qui prend de la signification suite aux comportements et actions que développent les usagers à son égard. De cette façon, les acteurs humains peuvent utiliser, approprier, modifier, accepter ou rejeter intranet, dépendamment des significations créées et négociées entre eux dans le temps. Dans cette recherche, nous définissons le terme « significations » en tant que représentations mentales créatrices des sens qui justifient certaines actions humaines et qui sont liées à des sentiments positifs ou négatifs des acteurs sociaux.

(3) Comment la relation bidirectionnelle qui se crée entre intranet et ses usagers affecte la communication entre les acteurs humains au sein d'une organisation ? [voir la relation (3), Figure 1]

Nous étudions les relations suggérées par cette troisième question de recherche à la lumière de la perspective structurationniste. En nous appuyant sur les travaux de Barley (1986) et Orlikowski (1992), nous supposons que c'est à partir de l'interrelation de nature dialectique et continuelle qui émerge entre intranet et ses usagers que la communication entre les différents acteurs humains au sein de l'organisation subit des modifications. Intranet impose aux acteurs des nouvelles procédures et façons spécifiques de travailler et, en retour, les usagers développent des significations qui se traduisent par des comportements et actions explicites sur cette technologie. Dans ce cycle d'influence mutuelle et structurante, nous nous attendons à ce que la communication entre les utilisateurs d'intranet se métamorphose sur plusieurs dimensions. Dans le cadre de cette étude, les neuf dimensions explorées de la communication sont les suivantes : la quantité de la communication ; la rapidité de la communication ; la fréquence de la communication ; les canaux de communication ; la direction de la communication ; la personnalisation de la communication ; la nature de la communication ; le mode de communication ; et l'étendue de la communication.

MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE

Dans le cadre de notre recherche nous avons effectué des analyses de cas de deux compagnies canadiennes, Softi-Net et ManuCap. (pseudonymes), opérant dans des industries différentes. La méthode d'étude de cas multiples proposée par Eisenhardt (1989) et Creswell (1998) a été retenue dans cet article. Trois raisons fondamentales justifient notre choix méthodologique. D'abord, la méthode de cas permet au chercheur de décrire en profondeur et de mieux comprendre le contexte dans lequel les phénomènes étudiés se produisent. Ensuite, intranet, en tant que réalité organisationnelle, est considéré dans notre étude comme étant un construit social en grande partie mental, qui est créé, perçu et approprié par les acteurs humains (Davis et Taylor, 1986). Finalement, comme le suggère Hudson et Ozane (1988), cette réalité sociale est mieux comprise et expliquée si elle est étudiée du point de vue des acteurs sociaux (ex. usagers d'intranet) qui interagissent avec et sont impliqués dans la construction, perception et modification de cette réalité. Les comparaisons entre les deux études de cas que nous avons effectuées dans notre article permettent d'explorer les dynamiques variées entourant le même construit social dans chaque entreprise analysée et d'observer l'impact différencié qu'elles exercent sur le contexte organisationnel et la communication entre les acteurs sociaux.

Les données primaires ont été collectées à travers les entrevues semi-structurées avec les acteurs humains (ex. président, membres de l'équipe de direction et employés) et les observations non-participantes de la réalité sociale au sein de chaque entreprise. Les cinq entrevues en profondeur que nous avons effectuées dans chaque compagnie analysée ont eu lieu pendant la première moitié de l'année 2006. Le seul critère de sélection des personnes interviewées était qu'elles aient été employées par l'entreprise au moins deux ans avant l'implantation d'intranet. Un guide d'entrevue semi-structuré, incluant des questions ouvertes sur les différentes dimensions du contexte organisationnel et de la communication entre les acteurs, les expériences vécues et perçues par les usagers d'intranet avant et après l'arrivée de cette technologie, a été construit et utilisé lors des entretiens. Les réponses aux questions posées ont été enregistrées, transcrites et analysées à l'aide du logiciel d'analyse de données qualitatives Nvivo07. Pour simplifier le processus ultérieur de description et de présentation des résultats, le contenu de chaque entrevue réalisée a été divisé en plusieurs segments de texte illustrant la même idée ou le même concept et ensuite, un code qualitatif a été assigné à chaque segment de texte identifié. D'après Huberman et Miles (1991), une telle procédure d'analyse de contenu en cascade facilite les comparaisons inter-organisationnelles.

Nous nous sommes rendus plusieurs fois sur les lieux des compagnies étudiées pour effectuer des observations sur les usagers d'intranet dans leur contexte réel de travail. Le but de ces observations de nature non-participante est d'étudier passivement les dynamiques et les interrelations entre les acteurs et intranet sans influencer le comportement des observés. Nous avons pris en note nos observations du terrain et, par la suite, nous les avons utilisées pour compléter notre travail de codage réalisé précédemment avec le logiciel Nvivo07. Pour enrichir nos analyses et interpréter les résultats, nous avons aussi recouru à plusieurs données secondaires, telles que des publications d'affaires, des bases de données sur les industries, des pages web des compagnies analysées et des documents internes relatifs au phénomène étudié.

Patton (2002) affirme qu'une recherche empirique de nature qualitative devrait être conduite à partir de plusieurs sources de données afin de gagner en robustesse, validité et crédibilité. Le processus permettant d'établir des zones de concordance et de divergence entre diverses sources d'information et d'interprétation s'appelle triangulation (Yin, 2003). En nous appuyant sur les suggestions de ces auteurs et eu égard à la richesse et la diversité des informations collectées, nous avons effectué la triangulation de différentes sources de données, telles que les entrevues, les observations non-participantes et les données secondaires. En ce qui concerne l'aspect éthique de cette recherche, il convient de noter que nous avons signé une entente de confidentialité avec les deux entreprises étudiées par laquelle nous nous sommes engagés à : (a) garder les noms des compagnies et des personnes interviewées dans l'anonymat ; (b) ne pas divulguer les informations considérées comme étant privilégiées et stratégiques pour l'organisation ; et (c) faire parvenir les résultats de notre étude aux responsables des entreprises analysées.

ANALYSE ET DISCUSSION DES RÉSULTATS

Le cas de Softi-Net

Softi-Net est une entreprise de petite taille qui opère dans l'industrie canadienne du développent du logiciel. Cette compagnie se spécialise dans le domaine de la sécurité informatique. Softi-Net offre ses produits et ses services à plusieurs entités tant publiques que privées localisées non seulement au Canada, mais aussi ailleurs dans le monde. Ses clients proviennent des secteurs d'activité aussi diversifiés que le gouvernement, l'enseignement universitaire, les services financiers, les télécommunications et les services de santé. Grâce à sa stratégie axée sur l'innovation et l'intégration du client et de ses besoins dans le processus de conceptualisation des logiciels, depuis quelques années cette compagnie connaît une croissance soutenue des affaires. Softi-Net est gérée par des gestionnaires qui possèdent une large expérience dans le développement de produits et de solutions de sécurité informatique de haute pointe. Au moment quand nous avons conduit nos entretiens avec les employés de cette entreprise, intranet était en place depuis environ quatre ans.

Le cas de ManuCap

ManuCap est une compagnie canadienne qui opère depuis plusieurs années dans l'industrie manufacturière de composantes électroniques. Avec une stratégie fortement orientée vers les exportations, ses clients proviennent principalement de l'Amérique du Nord et des pays membres de l'Union Européenne. Bien qu'elle offre une vaste gamme de produits, ManuCap se spécialise dans la conception et la fabrication de puces graphiques et de signaux analogiques. L'entreprise fait des affaires avec les industries des services informatiques, des télécommunications, du logiciel et de l'instrumentation qui utilisent régulièrement ses produits sophistiqués et à forte valeur ajoutée. ManuCap interagit continuellement avec ses clients et ses fournisseurs, fait qui lui permet d'échanger des informations privilégiées et de mieux comprendre les tendances et les besoins technologiques du marché. La mise en place d'intranet chez ManuCap avait eu lieu depuis cinq ans au moment où nous avons recueilli les données.

(1) Comment intranet affecte-il les différentes dimensions du contexte organisationnel ?

Nous avons pu obtenir des réponses à cette première question de recherche en effectuant des comparaisons entre les contextes organisationnels avant et après la mise en place d'intranet dans les deux compagnies étudiées. Les résultats de nos analyses sont décrits dans le Tableau 2 qui résume les modifications apparues dans le contexte organisationnel de Softi-Net et ManuCap.

Softi-Net opère dans l'industrie du logiciel, tandis que ManuCap - dans l'industrie manufacturière des composantes électroniques. Bien que les deux compagnies proviennent des secteurs à savoir intensif où la ressource la plus importante est la connaissance, ManuCap est aussi basée sur des actifs tangibles comme le capital, étant donnée la nature de ses activités. « En termes de ressources, le plus important chez nous sont les 'smart people' qui veulent constamment innover et créer des nouvelles choses » (Directeur marketing, Softi-Net). Softi-Net a été lancée par un groupe restreint de personnes qui sont devenus membres de la haute direction. Même si après l'implantation d'intranet le nombre d'employés est passé de quatre à 50, toutes les personnes interviewées affirment que ce changement n'est pas relié à intranet, mais est dû exclusivement à la croissance des affaires, à la commercialisation de nouveaux produits et à l'ouverture de nouveaux marchés. « Depuis le début, nos affaires roulent très bien. Nos produits accrochent pas mal. On n'a pas eu de choix d'embaucher des gens » (Président, Softi-Net). Pour ce qui est de ManuCap, la mise en place d'intranet a provoqué des coupures importantes dans ses effectifs, passant de 600 à 500 employés. Selon le directeur des finances, « cette implantation a été beaucoup plus chère que prévue... vous comprendrez, on a des objectifs à remplir ». Cette citation illustre la force du modèle de « l'impératif technologique » qui prédit que l'avènement d'une nouvelle technologie provoque des changements importants dans le contexte organisationnel (Barley, 1986 ; Orlikowski, 1992).

Même si après l'implantation d'intranet la structure organisationnelle de Softi-Net est devenue matricielle, le niveau hiérarchique est passé d'inexistant à bas, cinq départements ont été créé et des nouveaux locaux ont été acquis, selon les dires des interviewés ces changements ne sont pas reliés à l'arrivée de la nouvelle technologie, mais plutôt à la croissance des affaires. En dépit du fait que ManuCap a conservé sa structure de type pyramidal bureaucratique et que le nombre de départements est resté le même, le niveau hiérarchique a diminué légèrement suite à l'implantation. Softi-Net a toujours eu une culture organique qui devait être maintenue pour pouvoir assurer ses activités d'innovation. Il semble que la petite taille de cette compagnie a été un facteur qui a permis le maintien dans le temps de ce type de culture organisationnelle. ManuCap, avec sa taille plus imposante et ses opérations manufacturières, a commencé après la mise en place d'intranet à développer dans sa culture principalement mécaniciste certains traits spécifiques à la culture organique (ex. une légère tendance vers la responsabilisation des employés, la décentralisation du pouvoir et, en conséquence, une prise de décisions plus rapide). Ces impacts observés dans le cas de ManuCap après l'implantation d'intranet sont alignés avec les résultats des travaux de Yates et Benjamin (1991).

L'arrivée d'intranet chez Softi-Net a généré des impacts contraires à ce qui s'est passé chez ManuCap, en augmentant légèrement le degré de centralisation du pouvoir ainsi que le niveau de contrôle et d'intervention des dirigeants dans le travail des employés et en ralentissant quelque peu la vitesse de prise de décisions. ManuCap a toujours eu un degré de formalisation très marqué (ex. procédures écrites de production, manuels d'utilisation, instructions, etc.) à cause de la complexité de ses opérations et sa taille organisationnelle. Dans le cas de Softi-Net, le degré de formalisation a été très bas lors de sa création, tandis que maintenant la compagnie présente un très fort degré de formalisation en dépit de sa petite taille. Par exemple, les employés doivent faire des courts rapports journaliers sur l'avancement de leurs activités et les poster sur intranet. « Tout le monde savait tout et si on avait besoin d'informations on consultait les gens... on n'avait pas besoin des documents formels qui prend trop de temps... on était dans le rush. Aujourd'hui on n'a pas le choix, on documente absolument tout au jour le jour. J'ai besoin de savoir tout ce qui se passe dans ma boîte. On a besoin des traces » (Président, Softi-Net).

La mise en place d'intranet a provoqué des modifications dans les dynamiques du travail d'équipe dans les deux entreprises étudiées. « Depuis toujours nous avons travaillé en équipe à l'intérieur de nos domaines de spécialisation, mais pendant les dernières années [après l'implantation d'intranet] nous avons aussi commencé à collaborer avec des équipes provenant d'autres départements » (Directeur de production, ManuCap). Le travail en équipe chez Softi-Net est une valeur fondamentale. Cependant, les collaborations inter-équipes ont été réduites significativement et les directeurs interviewés considèrent qu'intranet a joué un rôle important dans ce changement. « Aujourd'hui, il y a des murailles de Chine entre les équipes, car il s'agit de l'information très confidentielle de nos clients qui est en jeu. Chaque équipe a ses forums de discussion, ses wikis et ses blogs privés... personne en dehors de l'équipe peut y accéder » (Directeur marketing, Softi-Net).

Nos analyses suggèrent que même si les deux entreprises ont subi des changements dans leur contexte organisationnel suite à l'implantation d'intranet, ces changements ont été de nature différente. Tandis que Softi-Net a commencé à augmenter graduellement son niveau de centralisation, ManuCap est plutôt entrée dans un processus lent de décentralisation.

(2) Quelles sont les significations que les acteurs humains développent par rapport à intranet ?

Pour répondre à cette deuxième question de recherche nous avons analysé les significations que les acteurs sociaux des deux compagnies ont développées par rapport à intranet. Les différentes citations reproduites dans le Tableau 3 démontrent qu'intranet est un artefact construit socialement. Ce tableau a comme but de mettre en lumière les points communs et les différences entre les significations développées par les employés de Softi-Net et ManuCap.

Nos analyses suggèrent qu'il y a plusieurs ressemblances entre les significations des usagers d'intranet dans les deux entreprises de l'échantillon. Ainsi, on observe qu'intranet est perçu comme étant un outil efficace, qui évite des pertes de temps, facilite et améliore le travail en équipe et la collaboration entre les coéquipiers et qui peut être utilisé pour publier, rendre disponible et diffuser de l'information à l'intérieur de l'organisation, naviguer à la recherche d'informations, classifier les données et créer de forums de discussion. En dépit de ces similarités, il convient de noter plusieurs points de divergence entre les significations des usagers de Softi-Net et ManuCap qui les incitent à utiliser intranet pour des fins totalement différentes. Ainsi, dans le cas de Softi-Net, intranet est aussi utilisé pour formaliser les procédures, codifier et repérer l'information, développer la mémoire organisationnelle, contrôler l'avancement des travaux, gérer les connaissances, créer des nouvelles connaissances, effectuer et recevoir du feedback immédiat et créer des communautés virtuelles de pratiques. Pour ce qui est de ManuCap, la seule signification additionnelle que ses employés développent face à cet objet technologique et qui ne se retrouve pas chez Softi-Net est l'utilisation d'intranet en tant qu'outil qui permet d'améliorer la collaboration entre les différentes équipes de travail.

Comme le prédit le modèle du « choix stratégique », l'acteur a un pouvoir à exercer sur la technologie à travers ses significations et ses actions sur cette technologie (Lea et al., 1995). En d'autres termes, les significations et les interprétations que les acteurs sociaux se font d'un artefact (ex. intranet) affectent leurs interactions avec celui-ci et influencent leurs décisions relatives à ses différentes utilisations et à la place que cet artefact occupera dans le contexte de leur travail (Pinch et Bijker, 1986). C'est ainsi qu'intranet est construit socialement, compris à partir des interactions multiples et façonné et adapté aux besoins spécifiques des acteurs sociaux dans les organisations.

(3) Comment la relation bidirectionnelle qui se crée entre intranet et ses usagers affecte la communication entre les acteurs humains au sein d'une organisation ?

Afin de répondre à la dernière question de recherche, nous avons exploré l'impact de la relation « intranet - acteurs humains » sur la communication entre les acteurs sociaux au sein des deux organisations étudiées. Pour pouvoir observer les changements apparus, nous avons effectué des comparaisons entre les différentes dimensions de la communication tant avant qu'après l'implantation d'intranet au sein de Softi-Net et ManuCap. Le Tableau 4 illustre les résultats de nos analyses.

D'après les adeptes du modèle structurationniste (Giddens, 1979), c'est à partir, à la fois, des impacts exercés par intranet sur le contexte organisationnel et des actions de représentation que les acteurs se font par rapport à intranet, qu'une relation bidirectionnelle et structurante s'établit entre la technologie et ses usagers. Ce modèle reconnaît que les actions des acteurs sont facilitées et contraintes par la technologie, qui est en même temps le résultat des actions de ces acteurs. La technologie possède des propriétés structurelles qui imposent des règles et offrent des ressources aux acteurs humains dans leurs activités de tous les jours. Ces règles et ressources véhiculent les actions des acteurs sociaux et, en retour, elles sont façonnées à travers les utilisations qu'en font les acteurs sociaux de cette technologie (Orlikowski, 1992). Par le biais des actions répétitives des acteurs humains se développent des routines d'interaction avec la technologie, qui dans le temps deviennent des pratiques standardisées dans une organisation. C'est le cas de la communication entre les acteurs des deux compagnies étudiées qui subit des changements significatifs suite aux interactions constantes entre les acteurs sociaux et intranet. Comme résultat de ces actions et comportements réguliers des acteurs humains, la nouvelle façon de communiquer devient une pratique institutionnalisée au sein des entreprises de notre échantillon.

Pour ce qui est de la quantité, la rapidité et la fréquence de la communication, elles ont augmenté dans les deux compagnies suite à l'implantation d'intranet. Ces trois dimensions ont été affectées parce qu´intranet facilite et déclenche la communication, tandis que les acteurs développent des routines d'actions provoquant l'institutionnalisation de tels changements. Comme le démontre le Tableau 4, les canaux de communication tant chez Softi-Net que ManuCap se sont diversifiés notablement offrant plusieurs possibilités (ex. email, visioconférences, forums virtuels, etc.). La direction et la personnalisation de la communication n'ont pas été affectées chez Softi-Net, tandis que dans le cas de ManuCap ces deux dimensions sont devenues beaucoup plus transversales et personnalisées qu'auparavant.

La nature de la communication a été modifiée dans le deux cas, mais de façon différente. Contrairement à ManuCap où la communication est devenue plus informelle allant au-delà des barrières formelles de la structure organisationnelle, chez Softi-Net elle a commencé à se formaliser légèrement après l'implantation d'intranet. En ce qui concerne le mode de communication, Softi-Net présente des signes de cloisonnement dans la communication inter-équipes à cause des enjeux reliés à la confidentialité des informations privilégiées provenant de différents clients. À l'opposé, nous constatons que dans le cas de ManuCap la circulation de l'information est devenue plus rapide et fluide en dépit des barrières hiérarchiques. Finalement, même si l'étendue de la communication a augmenté dans les deux compagnies étudiées, cette augmentation a été plus notable chez ManuCap, facilitant ainsi la circulation efficace de l'information.

CONCLUSION

Dans cette étude exploratoire et comparative de deux entreprises provenant des secteurs industriels différents nous avons examiné, à l'aide de plusieurs modèles théoriques de la technologie, les diverses relations qui s'établissent entre intranet et les acteurs sociaux. Trois groupes de trouvailles se dégagent de nos analyses de cas. Premièrement, tel que prédit par le modèle de « l'impératif technologique », nous observons qu'intranet exerce un impact sur plusieurs aspects structurels et managériaux du contexte organisationnel de Softi-Net et ManuCap. Deuxièmement, nous démontrons qu'intranet est un construit social qui est conçu, influencé, perçu et recréé par les actions de significations des acteurs humains au sein des deux compagnies étudiées, en corroborant ainsi le modèle du « choix stratégique ». Dernièrement, en nous appuyant sur notre modèle structurationniste d'intranet, nous remarquons que c'est à partir de l'interaction dialectique, structurante et continuelle entre intranet et ses usagers que plusieurs dimensions de la communication entre les acteurs sociaux subissent des changements en devenant des pratiques institutionnalisées dans les entreprises de l'échantillon. Cependant, les modifications observées dans le contexte organisationnel et la communication entre les acteurs humains ont été de nature opposée chez Softi-Net et ManuCap. Tandis que la première a commencé à centraliser le pouvoir et à exercer plus de contrôle sur les activités de ses employés après la mise en place d'intranet, la deuxième s'est plutôt orientée vers la décentralisation du pouvoir et la responsabilisation de ses employés.

Il convient de rappeler que le but de cette recherche était de continuer nos travaux portant sur l'approche structurationniste d'intranet (Spraggon et Bodolica, 2006), en peaufinant le modèle proposé et en élargissant l'échantillon des entreprises analysées à des nouvelles industries. Dans une étude antérieure de trois compagnies, Lambda Inc., Zêta Canada et Kappa Com., opérant dans des industries de jeux électroniques, de voyages corporatifs et des télécommunications, respectivement, nous avons conclu que les entreprises de plus grande taille, ayant des structures pyramidales bureaucratiques et une culture de type mécaniciste ont été affectées plus significativement par l'arrivée d'intranet que les entreprises de petite taille, avec une structure horizontale et culture organique. Plusieurs comparaisons intéressantes peuvent être effectuées entre les résultats de cette étude et celle de Spraggon et Bodolica (2006). D'abord, ManuCap, une entreprise manufacturière de composantes électroniques, qui avant la mise en place d'intranet comptait environ 600 employés et avait une structure pyramidale bureaucratique et une culture de type mécaniciste, adopte un modèle de changement très similaire à celui de la compagnie de télécommunications Kappa Com. Une telle convergence de résultats entre ManuCap et Kappa Com., qui montrent une claire tendance vers la décentralisation du pouvoir et de la prise de décisions, la dilatation du niveau hiérarchique dans le style de management et la communication entre les acteurs sociaux, n'est pas surprenante étant données les similarités entre les deux compagnies relatives à la taille, la structure et la culture organisationnelles.

Ensuite, pour ce qui est de Softi-Net, il semble que ses fortes ressemblances avec Lambda Inc. du secteur des jeux électroniques, en termes d'industrie de savoir intensif basée sur les connaissances, de nombre réduit d'employés, de structure flexible avec peu de couches hiérarchiques, de culture organique, de style de management participatif et informel, d'aménagement intérieur en forme de loft et de communication de type informel, dynamique et spontané, n'ont pas favorisé des changements similaires suite à la mise en place d'intranet. En fait, la seule modification observée au sein de Lambda Inc. qui a été causée par intranet est la décentralisation du niveau hiérarchique dans cette compagnie. À l'opposé, Softi-Net subit plusieurs changements dans le contexte organisationnel qui sont directement liés à intranet, comme par exemple le degré de formalisation plus élevé, la distribution du pouvoir moins décentralisée et le style de management plutôt dirigé et orienté vers le contrôle. De plus, la rapidité de prise de décisions chez Softi-Net diminue à cause du besoin de formalisation et de suivi des nouvelles procédures établies dans cette entreprise. Enfin, tandis que les différentes dimensions de la communication entre les acteurs sociaux ne sont pas du tout affectées chez Lambda Inc., dans le cas de Softi-Net la quantité, la rapidité et la fréquence de la communication augmente et la nature et le mode de communication deviennent un peu plus formels et cloisonnés suite à l'implantation d'intranet.

Ces différences entre deux compagnies similaires pourraient s'expliquer par la spécificité relative à la nature de leurs activités. Comme Softi-Net travaille avec des informations confidentielles de ses clients qu'elle doit absolument protéger, l'entreprise est portée à cloisonner l'information à l'intérieur de ses équipes de travail, contrairement à Lambda Inc. qui offre des jeux électroniques, un produit de masse dont la conception et la distribution n'impliquent pas d'enjeux de confidentialité pour ses clients. La personnalité du président et les valeurs, les expériences et le vécu de l'équipe de direction pourraient aussi expliquer pourquoi la mise en place d'intranet a généré des changements beaucoup plus prononcés chez Softi-Net que Lambda Inc. Tandis que le président de la première compagnie est une personne qui a besoin de contrôler, se définissant lui-même comme étant « organizational freak », et que les autres membres de l'équipe de direction de Softi-Net suivent aussi cette tendance de contrôle pour assurer la réplicabilité des résultats, les valeurs des dirigeants de Lambda Inc. se caractérisent par la liberté, la créativité, la gestion ouverte et l'absence des règles et des procédures spécifiques.

À notre connaissance, cette recherche est parmi les premières études exploratoires et comparatives qui ont été effectuées sur un type particulier de technologie (ex. intranet) en utilisant à la fois un modèle structurationniste et un échantillon de compagnies canadiennes provenant de différents secteurs industriels. En dépit de ces contributions, notre étude comporte certaines limites qui doivent être reconnues. Nos données ont été recueillies dans deux entreprises seulement, fait qui entraine des limites relatives à la validité externe des résultats obtenus. Cependant, il faut noter que la généralisation statistique n'est pas le but d'une recherche qualitative de type exploratoire comme c'est le cas de notre recherche. Les études de cas visent la généralisation de type analytique où les résultats empiriques doivent contribuer à l'enrichissement des théories existantes (Yin, 2003). Généralement, il est souvent approprié de réaliser plusieurs entretiens dans chaque compagnie qui constitue l'échantillon. Toutefois, dans le contexte de notre étude, nous avons décidé de nous limiter à cinq entrevues par entreprise analysée, étant donné qu'après la troisième ou la quatrième entrevue les informations recueillies ont commencé à se ressembler beaucoup, nous amenant au point de saturation dans la collecte de données.

BIBLIOGRAPHIE

Virginia Bodolica

Ph.D. American University of Sharjah School of Business and Management

Department of Management, Marketing and Public Administration

P.O. Box 26666 Sharjah, United Arab Emirates

Tel: +(971) 6 515-2308

Fax: +(971) 6 558 5065

E-mail: virginia.bodolica@hec.ca

Manuscript first received: 22/07/2007

Manuscript accepted: 05/10/2007

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    Ph.D.American University of Sharjah School of Business and Management
    Department of Management, Marketing and Public Administration
    P.O. Box 26666 Sharjah, United Arab Emirates
    Tel: +(971) 6 515-2585
    Fax: +(971) 6 558 5065
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  • Publication Dates

    • Publication in this collection
      11 Mar 2011
    • Date of issue
      2007

    History

    • Received
      22/0
    • Accepted
      05/1
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