L'effort en vue de surmonter l'opposition entre le subjectivisme et l'objectivisme est à la racine de la perspective praxéologique de Bourdieu, dont le noyau est la relation dialectique entre, d'une part, des conduites individuelles subjectivement propulsées par des dispositions intégrées dans un habitus et, d'autre part, des structures objectives ou « champs » de relations entre des agents avec des positions différentes et des pouvoirs inégaux. Les critiques ont, néanmoins, désigné cette théorie comme une version sophistiquée du néo-objectivisme et non pas comme une théorie synthétique réussie de la relation entre action et structure. L'article propose une évaluation du sens de cette critique et démontre qu'elle est partiellement justifiée. Il soutient la thèse selon laquelle la principale source du néo-objectivisme dans l'œuvre de Bourdieu provient principalement de l'accent qu'il porte sur la nature tacite ou « préréflexive » de l'opération de l'habitus, ce qui le conduit à une théorisation qui néglige la signification de la conscience réflexive de l'acteur pour l'action. Grâce à ce diagnostic, le texte indique quelques parcours techniques grâce auxquels le schéma analytique de Bourdieu peut être dirigé vers un traitement véritablement dialectique de l'interdépendance causale entre les actions individuelles et les structures sociales.
Pierre Bourdieu; Théorie de la pratique; Néo-objectivisme; Habitus; Réflexivité