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PORTRAIT DU DISQUE EN “MÉDIATEUR FLUIDE” DES CULTURES POLITIQUES1 1 Article non publié sur une plateforme de prépublication – preprint. Tous les enregistrements mentionnés dans l’article peuvent être écoutés à cette adresse : http://www.memoriadamusica.com.br/site/index.php/texto-e-audio/29-texto-e-audio/dossie-historia-e-culturas-sonoras/499-retrato-do-disco-como-mediador-fluido-das-culturas-politicas-jonathan-thomas

Résumé

Cet article présente une synthèse de mes recherches sur les disques de propagande produits en France au 20e siècle. Il introduit le nouveau concept de « médiateur fluide», qui décrit la capacité de ces disques, porteurs de cultures politiques sonores, à se faire entendre dans des espaces sociaux hostiles à ces cultures. À partir de cas historiques, cette capacité est analysée au prisme de l’imaginaire et des temporalités du disque et du son enregistré.

Mots-clés
Disques; Cultures politiques; Médiation; Propagande; France

Resumo

Este artigo apresenta um resumo de minhas pesquisas sobre os discos de propaganda produzidos na França no século XX. Proponho a noção de “mediador fluido” para descrever a capacidade desses discos, portadores de culturas políticas sonoras, de serem ouvidos em espaços sociais hostis a tais culturas. Com base em casos históricos, analiso essa capacidade sob os prismas do imaginário e das temporalidades do disco e do som gravado.

Palavras-chave
discos; culturas políticas; mediação; propaganda; França

Abstract

This article summarizes my research on propaganda discs produced in France in the 20th century. I introduce the new notion of “fluid mediator” to describe the capacity of these discs, bearers of sound political cultures, to be heard in social spaces hostile to these cultures. Using historical cases, I analyze this capacity through the prisms of the imaginary and the temporalities of the disc and the sound recorded.

Keywords
discs; political cultures; mediation; propaganda; France

Les supports du son enregistré ont servi de moyens de propagande aux organisations politiques françaises tout au long du XXe siècle3 3 Les informations sur les disques présentés ici sont rassemblées dans la base de données PS.xx – La propagande sonore enregistrée au XXe siècle, répertoriant les supports produits pour la propagande politique en France au 20e siècle. Voir: https://didomena.ehess.fr/collections/st74cw33j?locale=fr. PS.xx est soutenue par la Région Ile-de-France dans le cadre du Domaine d’intérêt majeur Patrimoines matériels, expérimentation, innovation et résilience. . Dès le début des années 1900, des discours étaient enregistrés sur des cylindres pour être diffusés dans des réunions politiques. En 1909 et 1910, deux séries de disques ont rassemblé pour la première fois des chants socialistes et royalistes pour la propagande de la Section française de l’Internationale ouvrière (SFIO) et de l’Action française (AF)4 4 Le phonographe socialiste, l’Humanité, Paris, 23/11/1909, p. 4; Les chants royalistes, L’Action Française, Paris: 19/05/1910, p. 1. . Au cours des années 1930, la plupart des partis pratiquaient une propagande par le disque ou, comme on peut la désigner aujourd’hui, une propagande sonore enregistrée, grâce à des catalogues de plusieurs dizaines de disques produits par des entreprises militantes. Après la Seconde Guerre mondiale, cette forme de propagande perdure comme moyen d’agitation par le discours, de diffusion quotidienne d’esthétisations de la politique par la musique, ou d’un travail porté sur la mémoire par le biais de compilations de documents historiques sonores. Le principe de ces usages est simple: étendre considérablement dans le temps et l’espace les possibilités de transmettre des discours et des chants partisans, c’est-à-dire des idées, des normes de comportement, des traits esthétiques, des mémoires et des affects, à des auditoires distants.

Ces disques produits pour la propagande politique, ou plus simplement ces «disques politiques», sont ainsi des traces de cultures politiques, c’est-à-dire d’ensembles de représentations, de normes esthétiques ou éthiques, et de pratiques sociales relatives à des projets politiques. (BERSTEIN, 1992BERSTEIN, Serge. L’historien et la culture politique. Vingtième Siècle, Revue d’Histoire, Paris, n. 35, p. 67-77, juillet-septembre 1992. Doi: https://doi.org/10.3406/xxs.1992.2567.
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, p. 67-77). En proposant des chants ouvriers ou royalistes, du free jazz ou de la musique militaire, des discours socialistes ou d’extrême droite, ces disques ont propagé ces représentations, ces normes et ces pratiques comme autant de graines culturelles dont l’éclosion devait favoriser la réalisation de projets politiques divers5 5 Se reporter aux catalogues Piatiletka, Disques Hébertot, Unitélédis, Uni/Ci/Té et Serp présentés dans la base de données PS.xx – La propagande sonore enregistrée au XXe siècle. . Négligés par la recherche jusqu’à récemment, ils furent pendant longtemps le seul moyen pour les partis, les ligues et les syndicats de faire exister leur propagande sonore en toute liberté6 6 Pendant l’entre-deux-guerres, la parole politique est exclue des ondes françaises, contrôlées par un monopole d’État, jusqu’à la campagne des élections législatives de 1936 (MÉADEL, 1994, p. 13). Après-guerre, l’accès aux médias de masse est perçu par certaines organisations politiques comme réservé à celles qui exercent déjà le pouvoir. Sur la pochette d’un disque communiste de 1978, on peut lire: «Pourquoi un disque: Aujourd’hui, il est de plus en plus difficile aux citoyens de se réunir pour discuter: les horaires, la fatigue, etc., en sont les causes principales. La radio et la télé font le reste, mais elles sont surtout un instrument des candidats de la majorité. Face à ses puissants moyens modernes, les communistes de la 2e circonscription du Vaucluse ont pensé que le disque, modeste moyen moderne, vous permettrait au moins d’entendre leurs candidats. Bonne écoute !» (LIOTAUD, François, Entretien avec François Liotaud, candidat du Parti communiste français, Bagnolet: Uni/Ci/Té, 1978, disque microsillon 17 cm). Les disques politiques français des années 1930 ont été mentionnés dans au moins deux ouvrages sur le Front populaire (ORY, 2016 [1994], p. 303; BASILE, CORDEREIX, 1997, p. 96). Récemment, une thèse a été soutenue (THOMAS, 2021), et des chercheurs ont commencé à investiguer cet objet (BOULLAND, 2018). . Ils représentent donc une ressource de communication de première importance, dont la conception, la production, les usages, et les effets sociaux restent à étudier. La question de leur circulation, c’est-à-dire du nombre et de la qualité des lieux où les disques politiques furent joués, des espaces culturels ou sociaux où ils résonnèrent, de la multiplication ou de la viralité de leurs écoutes, doit être, parmi d’autres, posée.

Une façon de l’aborder est de considérer que les disques sont presque toujours munis d’étiquettes indiquant les détails des enregistrements qu’ils portent et qu’ils font l’objet d’écoutes désirées, choisies, par les personnes qui engagent leur lecture: ils annoncent leur programme sonore, et circulent même parce qu’ils le font. Or, les disques politiques, produits pour manifester une culture politique et mobiliser une communauté militante particulière, manifestent des prises de partis. Ils sont donc clivants, ce qui pourrait limiter leur circulation. Outre cette limitation, une autre, cette fois temporelle, est à considérer. Une fois passé le contexte ayant motivé leur production, on pourrait penser que, dans de nouveaux contextes, ces disques ne se prêteraient plus qu’à une communication inactuelle et donc inefficace. Ces deux limites existent, mais elles sont poreuses. D’une part, l’examen de l’histoire des disques politiques et de leurs usages montre qu’ils ont parfois traversé les frontières de cultures politiques adversaires. De l’autre, leurs opérateurs ont souvent joué sur leur appartenance à un passé plus ou moins lointain et, plutôt que de percevoir en cet éloignement une autre frontière, en ont fait un moyen d’agir dans le présent. Ainsi, quand un disque politique franchit ces frontières, il nous semble qu’il fonctionne comme un «médiateur fluide» de la culture politique qu’il porte: il permet alors à celle-ci d’infiltrer d’autres cultures politiques, mais aussi certains espaces sociaux, de se rendre présente quand et là où on ne l’attend pas.

Nous proposons ici de brosser un portrait du disque en médiateur fluide des cultures politiques. Sans considérer que le disque soit le dépositaire exclusif de cette capacité de médiation, il s’agit de réfléchir à ce qui lui permet d’exister comme tel afin de mieux renseigner sa socialisation. Celle-ci nous semble reposer sur deux éléments qui conditionnent les pratiques (politiques) du disque: l’imaginaire du son enregistré, dont procède l’imaginaire du disque; les rapports au passé et au présent, c’est-à-dire au temps, que l’usage d’un disque fait intervenir ou crée au sein des pratiques phonographiques. Tous deux participent à la conception des disques politiques et à la réalisation de leurs usages, quel que soit le type de contenu – musique, discours, diction – qu’ils véhiculent. D’une part, l’imaginaire définit les qualités d’un objet et donc ce qu’il est possible de faire grâce à cet objet. De l’autre, le rapport au temps que provoque un objet – par exemple, une intensification du présent ou une plongée dans le passé – définit le type d’opération que l’on peut engager à travers cet objet. En effet, en tant que support d’un enregistrement, le disque est toujours l’archive matérielle d’un passé plus ou moins proche. Or, il nous semble que les opérations de propagande sonore enregistrée, qui visent à faire sonner les cultures politiques à l’échelle la plus large possible (y compris là où on ne voudrait pas les entendre), peuvent être classées en deux types temporels. Le premier correspond à l’insertion d’un passé proche, quasi-présent, dans le présent, et à des opérations d’agitation. Il réalise une volonté urgente d’agir dans une situation ponctuelle qui présente des opportunités uniques. Le second correspond à la réactualisation d’un passé lointain. Il a logiquement pris de l’importance au fur et à mesure que les enregistrements se multipliaient et que le temps passait. Il se prête à des opérations d’entretien et d’extension communautaire au long cours par la mémoire, et nécessite que le disque politique soit confondu par son auditoire avec un disque “d’histoire“; un assemblage de documents historiques, d’enregistrements contemporains ou de témoignages, compilés pour communiquer un récit historique par le son. Ces versions sonores de l’histoire sont toujours affirmées comme véridiques, et plus encore quand elles sont révisionnistes.

Or, un tel usage politique du disque est rendu possible par un imaginaire spécifique au son enregistré. On pourrait poser que les usages politiques de la musique procèdent, dès avant son enregistrement, d’un imaginaire de l’universalité des émotions suscitées par les arts. Le son musical serait ainsi un médiateur fluide des cultures politiques par l’émotion avant tout. Pour sa part, le son enregistré a pour principale qualité imaginaire d’être un agent de la vérité: il en est à la fois un échantillon et une preuve factuelle. S’il émeut, c’est parce qu’il est reconnu comme vrai. Conditionnant les représentations et la socialisation de l’incarnation du son enregistré qu’est le disque, cet imaginaire en conditionne l’évolution en tant qu’objet matériel et marchandise, et donc comme moyen de propagande.

Dans un premier temps, nous décrirons d’abord l’imaginaire du son enregistré et sa puissance politique. Nous étudierons ensuite la fluidité médiale du disque politique au cours de deux épisodes de son histoire en France qui ont jusqu’à présent concentré notre recherche sur les disques politiques et l’imaginaire politique du son enregistré. Le premier de ces épisodes se déroule durant les années 1930. La propagande sonore enregistrée devient massive et se définit pour la suite du 20e siècle. Principalement utilisé comme médiateur de passés quasi-présents, le disque sert aussi, déjà, à communiquer l’histoire et à tenter de rassembler à travers elle des communautés élargies. Cependant, c’est le disque musical qui est le plus utilisé comme un médiateur fluide des cultures politiques. Avant d’examiner le rapport entre la promesse de vérité du son enregistré et l’histoire, il sera nécessaire de considérer les conséquences de l’enregistrement sur la médiation fluide du son musical. Le second épisode se déroule entre 1963 et les années 1980, lorsque Jean-Marie Le Pen se livre à la propagande par le disque. Le futur homme fort de l’extrême droite française est alors à la tête d’une entreprise créant ce qu’elle présente comme des disques d’histoire. Ceux-ci sont en fait politiques et, réactualisant des passés déjà lointains, diffusent des idéologies criminelles au-delà du cercle restreint de leurs partisans. Nous pourrons alors réfléchir à la socialisation du disque comme moyen de communication sonore de l’histoire, et sur les conséquences parfois néfastes de sa fluidité médiale sur le rapport des sociétés à leur passé.

Un médiateur sans médiation

Thomas A. Edison dépose le brevet du premier phonographe en 1877, puis présente sa machine aux États-Unis et en Europe l’année suivante. Le journaliste français Pierre Giffard, attentif aux inventions d’Edison, décrit en 1878 l’usage politique qu’il en imagine:

Pour les discours officiels du chef de l’État, […] au lieu d’avoir recours à l’Imprimerie Nationale pour faire imprimer le discours, on n’aura plus qu’à le faire reproduire par la galvanoplastie et à l’envoyer à toutes les communes, munies, au préalable, d’un phonographe officiel et contrôlé´. Le maire fera tourner l’appareil et la population rassemblée sur la place du village entendra les accents vénérés du chef du gouvernement7 7 GIFFARD, Pierre, Le Phonographe expliqué à tout le monde. Edison et ses inventions, Paris: Maurice Dreyfous, 1878, p. 34-35. .

De son côté, Edison imagine lui aussi les premiers usages de cet appareil à l’état technique pourtant trop rudimentaire pour les réaliser. Il considère l’enregistrement de la parole non pas comme le moyen d’une communication actualisant le pouvoir politique, mais de la conservation de l’excellence de la langue parlée. Dans une liste d’usages «emblématique de la protohistoire du disque» (MAISONNEUVE, 2009MAISONNEUVE, Sophie. L’Invention du disque, 1877-1949. Genèse de l’usage des médias musicaux contemporains. Paris: Éditions des Archives Contemporaines, 2009., p. 21), il affirme que le phonographe doit servir à «la préservation de la langue par la reproduction de nos Washington, de nos Lincoln, de nos Gladstone». Edison et Giffard désignent ainsi deux qualités du son enregistré qui rendent son emploi désirable pour une opération de communication politique.

L’usage imaginé par Giffard procède des qualités de dissémination des technologies du son enregistré. Celles-ci permettent de répéter des sons détachés du lieu et du temps de leur première émission, d’élargir considérablement les territoires couverts par les dispositifs de propagande sonore, et d’atteindre des auditoires auparavant inaccessibles. Dans la seconde moitié du 20e siècle, cette qualité pratique évidente du son enregistré motive des opérations de propagande massive par le disque ou la cassette audio, qui devaient saturer un territoire afin de susciter le plus d’écoutes possibles chez un auditoire indistinct, et peut-être séduire des oreilles indécises ou indifférentes8 8 Par exemple, le Front national a distribué plusieurs centaines de milliers de cassettes audio pour la campagne des élections européennes de 1994 (THOMAS, 2020, p. 70-73). .

L’usage imaginé par Edison, lui, ne concerne pas la propagande en premier lieu. Il s’appuie cependant sur une qualité imaginaire du son enregistré qui structure généralement ses usages, et donc ses usages politiques. En effet, les trois personnes dont l’inventeur souhaite préserver la parole sont reconnus comme de grands orateurs, dont l’éloquence motive probablement plus l’enregistrement des textes qu’ils prononcent que ces textes eux-mêmes. Bien que sa machine enregistre très mal et ne propose qu’une expérience d’écoute certes miraculeuse mais médiocre, Edison pense qu’elle sera capable de conserver ces paroles avec une finesse suffisante pour faire de leurs enregistrements un moyen de perpétuation de l’excellence d’une langue (GITELMAN, 2012GITELMAN, Lisa. The phonograph’s new media publics. In: STERNE, Jonathan (ed.). The Sound Studies reader. London; New-York: Routledge, 2012., p. 284). Ce faisant, l’inventeur imagine le phonographe comme un instrument exact, dont les productions servent de modèles et font autorité. Il fait ainsi de la phonographie, sur le plan de son imaginaire, une technologie de reproduction plutôt que de création sonore, alors même que la pratique de la machine donne à entendre des sons jusque-là inouïs, difficiles à identifier à leur source première. Cet imaginaire, qui prévaut sur l’expérience du phonographe, est à la source d’une idéologie de la machine qui participera à structurer sa socialisation, notamment commerciale, en tant qu’instrument d’une reproduction prétendument exacte.

Or, si nous imaginons la réalisation de l’usage imaginé par Edison et réfléchissons à ses conséquences, nous pouvons y reconnaître une première occurrence de la fluidité médiale du son enregistré, quel que soit son support. Tout d’abord, il faut poser que ces enregistrements de voix politiques sont considérés comme des échantillons de l’excellence d’une langue puisque le processus technique de l’enregistrement les conserve avec exactitude– dans le cas contraire, l’enregistrement n’aurait ici aucune utilité. Le fait qu’Edison ait choisi de conserver puis de transmettre ces voix leur confère un statut de bien commun: sa démarche les naturalise, et ne les fait plus apparaître à leurs auditoires comme des paroles politiquement situées. Celles-ci peuvent cependant continuer à fonctionner comme telles, et donc être diffusées dans des champs culturels et lors de pratiques, comme celle de l’enseignement, auxquels elles n’auraient probablement pas eu accès en tant que paroles partisanes. Le son enregistré possède donc la capacité, reposant sur ses qualités imaginaires, de s’immiscer dans tous les espaces sociaux malgré les éventuelles interdictions de circulation des significations qu’il porte.

Cette capacité n’est pas relative à celle, pratique, de la diffusion sonore, dont le volume peut traverser les murs ou de vastes espaces et s’imposer là où elle n’est pas désirée. Elle repose plutôt sur l’idée que le son enregistré propose une restitution du réel non biaisée par la perception humaine. On peut situer les racines de cette idée dans une recherche d’authenticité, de vérité, qui marque le 19e siècle et sa production scientifique (HOGG, 2008HOGG, Bennet. The cultural imagination of the recorded voice. PhD dissertation , Music and Cultural Theory. Royaume-Uni: Newcastle University, 2008., p. 247-256). En tant qu’oreille figurée percevant le son sans faire intervenir la subjectivité humaine, le premier phonographe apparait comme un instrument idéal pour la recherche empirique, car il est censé créer des relevés véritatifs du réel9 9 En tant qu’il est “véritatif”, un «relevé véritatif du réel” forme, exprime et impose une vérité incontestable du réel. Il extrait et donne la vérité essentielle du réel tout en y imprimant sa forme, ce qui est paradoxal. En ce sens, il fixe et efface dans un même mouvement les conditions de production de la vérité du réel. Il crée ainsi une représentation relative du réel, mais la fait passer pour absolue. . Le réel se révèlerait dès lors tel qu’en lui-même, son enregistrement dévoilant une part de sa vérité cachée à la perception humaine. Il est également possible de placer la représentation sociale du son enregistré en tant que matériau véritatif dans la perspective du romantisme social, lequel se méfie de l’expression des êtres et des choses puisqu’elle serait une médiation qui travestirait la véritable nature de (ce) qui s’exprime (CARNEVALI, 2020CARNEVALI, Barbara. Social appearances. A philosophy of display and prestige. New-York: Columbia University Press, 2020. Doi: https://doi.org/10.1080/10848770.2022.2029165.
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, p. 28-33). Sur le plan de la science et des relations sociales, le phonographe tend donc à exister comme une machine inexistante, comme un médiateur sans médiation, qui ne laisserait pas de trace sur le son qu’il enregistre puis reproduit10 10 Cette représentation du phonographe comme médiateur sans médiation est également à la racine d’un imaginaire non plus scientifique, mais magique de la machine (GIULIANI, 2009). Voir également plus bas dans ce paragraphe. . Ce faisant, il est investi d’un pouvoir imaginaire basé sur sa capacité de reproduction. Si cette capacité est partiellement démentie par la pratique, conduisant à l’usage du terme «fidélité» pour désigner la différence entre le son original et sa reproduction, elle est pleinement employée par des discours commerciaux qui, associés à des illustrations publiées dans la presse quotidienne, vantent l’effet de réel du son du phonographe et le dotent d’un pouvoir quasi-divin (MAISONNEUVE, 2009MAISONNEUVE, Sophie. L’Invention du disque, 1877-1949. Genèse de l’usage des médias musicaux contemporains. Paris: Éditions des Archives Contemporaines, 2009., p. 42-46). Ces discours sont rendus possibles par l’apparition, dix ans après le premier phonographe, d’un phonographe «perfectionné» doté de cylindres de cire offrant une écoute de plusieurs minutes et d’une qualité sonore améliorée. Cette nouvelle machine, grâce à laquelle seront réalisés les premiers usages politiques du son enregistré, inaugure le marché pérenne de la phonographie, laquelle touche désormais le grand public et investit peu à peu les foyers au tournant des 19e et 20e siècles (HOWLAND, 1999HOWLAND, William Kenney. Recorded music in American life: the phonograph and popular memory, 1890-1945. New York; Oxford: Oxford University Press, 1999., p. 24-28). Déjà relayé par les brèves que publie la presse quotidienne pour raconter de nouvelles pratiques sonores plus ou moins insolites, l’imaginaire de la puissance de faire du son enregistré et du phonographe est alors changé en arguments de vente. Une publicité parue en 1900 dans le journal partisan Le Radical fait la promotion du phonographe «Le Ménestrel» en affirmant que «s’élevant pour ainsi dire au rang d’un créateur, l’homme a pris de la matière: du fer, de la cire, du verre, et de ces choses inertes il a fait une machine qui parle, qui chante, qui rit, et qui sanglote11 11 Déconcertant et sublime, Le Radical, Paris, 29/04/1900, p. 4. Disponible sur https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k7612576m Consulté le 11 août 2023. ».

Ainsi, «l’homme» aurait manifesté une capacité divine nouvelle en donnant la vie à un autre que lui, en l’occurrence une machine qui produit les signes sonores du vivant et donc, en l’espèce, la vie elle-même. Le phonographe tient enfin sa promesse de corriger les défaillances de l’être humain et de lui ouvrir des possibilités inédites d’action. Dans le cadre de son usage scientifique, il est un assistant de l’oreille censé corriger les biais relatifs à une écoute subjective du réel. En tant que correcteur, il aligne la perception humaine, limitée et faillible, sur ses propres qualités pour l’améliorer, en faire une médiation sans médiation, et la rendre ainsi véritative. Dans le cadre d’un usage politique, ses opérateurs profitent de cette correction auditive pour amplifier leur puissance d’agir. Ils créent des sons reçus comme exacts, et donc suffisamment crédibles pour évoquer la vie et la présence véridique de l’orateur (BAUMANN, 2016, p. 42). En tant qu’amplificateur, le phonographe est donc la source d’une capacité d’agir par la production de simulacres sonores perçus comme d’authentiques morceaux du réel. Ce double rôle occasionne la légitimation tautologique de la perception par la production, et de la production par la perception. Socialisé, le phonographe peut exister comme un agent de la preuve, ce qu’il sera tôt dans son histoire lors d’affaires judiciaires12 12 H.V., Déposition d’un témoin auriculaire, L’Intransigeant, Paris, 20/05/1894, p. 2. .

Revenons maintenant à la notion de fidélité et à la conception du phonographe comme instrument exact. Alors que l’écart perçu entre le résultat d’un enregistrement et sa source sonore aurait pu conduire à un nouvel art des sons, spécifique à la médiation phonographique, c’est bien la quête de la reproduction parfaite d’un son premier qui guide le perfectionnement des machines et des supports du son enregistré (GIULIANI, 2009GIULIANI, Élizabeth. La Réception du média, Revue de la BNF, Paris, Bibliothèque Nationale de France, v. 3, n. 33, p. 9-19, 2009. Doi: https://doi.org/10.3917/rbnf.033.0009.
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, p.9)13 13 Ce débat est très présent dans la seconde moitié des années 1920, alors que l’enregistrement et la diffusion du son s’électrifient. Voir ADORNO, Théodore, Circonvolutions d’aiguille, Beaux passages, traduit de l’allemand [Nadelkurven] par Jean Lauxerois, Paris: Payot & Rivages, 2013 [1927], p. 215-220; CŒUROY, André, CLARENCE, Geneviève, Le Phonographe, Paris: Kra, 1929; TOURNEL, E., L’Utilisation actuelle du phonographe par la bourgeoisie, l’Humanité, 11/05/1927, p. 4. . Ce faisant, l’idée d’un art phonographique est repoussée dans l’inconscient de la phonographie et ne cesse de revenir à travers des pratiques de recréation d’événements sonores. Lors des premières démonstrations du phonographe aux États-Unis, il arrive que le démonstrateur et le public enregistrent des sons pour produire une parodie de meeting (FEASTER, 2007FEASTER, Patrick. “The following record”: making sense of phonographic performance, 1877-1908. Thèse de doctorat, Philosophie. États-Unis d’Amérique: Indiana University, 2007., p. 109). Dans la France de la Belle Époque, les discours de grandes personnalités politiques comme Félix Faure ou Sadi Carnot, sont enregistrés par des acteurs et vendus sans que ne soit toujours précisée la véritable identité de leurs interprètes (CHAMOUX, 2015CHAMOUX, Henri. La diffusion de l’enregistrement sonore en France à la Belle Epoque (1893-1914). Artistes, industriels et auditeurs du cylindre et du disque. Thèse de doctorat, Histoire Contemporaine. Paris: Université de Paris 1, Panthéon-Sorbonne, 2015., p. 274-278). Aux États-Unis, durant l’entre-deux-guerres, des disques de la multinationale Columbia s’adressent à la communauté immigrée italienne: ces «cartes postales» sonores recréent des moments de l’histoire de leur pays d’origine, et cultivent chez eux un sentiment de nostalgie (DOTTO, 2018DOTTO, Simone. L’illusione della patria lontana. Geografie translocative nella produzione di dischi parlati per gli italiani negli Stati Uniti (1917-1930), L’avventura, Bologna: Il Mulino, Fascicolo 2, p. 257-271, 2018. Doi: https://doi.org/10.17397/91651.
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).

En France, ces pratiques de recréation sont exercées lors d’usages politiques du son enregistré dès le début du 20e siècle. En 1902, le candidat à la députation Magne enregistre des discours accompagnés d’acclamations et de cris14 14 L’Abbé aux phonographes, La Lanterne, Paris, 16/04/1902, p. 1. . À partir des années 1930, on recrée des moments d’histoire. Comme d’autres, ces recréations historiques sont crédibles pour leur public parce qu’elles procèdent d’un mythe de la vérité phonographique, qui résume l’imaginaire véritatif du son enregistré et se répand notamment à travers des discours commerciaux. Ce mythe repose sur l’idée déjà évoquée que la phonographie est essentiellement une technologie de reproduction sans médiation, absolument véritative. Il concerne plus généralement le son technicisé, c’est-à-dire enregistré, transmis ou diffusé par des objets techniques, dès lors que ces derniers sont publicisés comme un rapport ou une émanation d’événements en train d’advenir. Et ce mythe ne concerne pas seulement l’enregistrement ou la transmission sonore en tant que produits finis, mais structure aussi l’organisation même de ces opérations. Jonathan Sterne démystifie ainsi la représentation en tant que transmission véridique du réel de l’événement retransmis en direct par la radio. Il cite le cas d’un match de boxe radiodiffusé au début des années 1920, dont toute l’organisation a été conçue pour favoriser la rentabilité de sa retransmission (STERNE, 2015STERNE, Jonathan. Une histoire de la modernité sonore. Trad. de l’anglais par Maxime Boidy. Paris: La Découverte, 2015., p. 280-282). La vérité qui en émane est donc construite par des choix techniques opérés pour respecter des impératifs économiques. Si nous devions y chercher une essence, ce ne serait pas celle de l’événement, mais de la marchandisation du réel en tant que spectacle du vrai.

Suivant toujours Sterne, nous pouvons considérer que les enregistrements reçus comme des rapports véridiques du réel sont des constructions qui articulent ensemble des «artifices de l’authenticité» (STERNE, 2015STERNE, Jonathan. Une histoire de la modernité sonore. Trad. de l’anglais par Maxime Boidy. Paris: La Découverte, 2015., p. 346-353). Ces artifices sont produits par celles et ceux qui émettent les sons captés ou travaillent à leur captation, en veillant à leur insuffler une authenticité crédible. Cependant, seuls leurs auditoires ont finalement le pouvoir de croire en ces artifices et de les instituer comme «authentiques». Sterne posant que “le but de la reproduction d’événements live n’est pas de reproduire la réalité, mais de produire une expérience d’écoute singulière» (p. 353), il apparaît que les enjeux fondamentaux posés par la technicisation du son et sa socialisation sont la manipulation de la crédibilité du public et le but de cette manipulation.

La propagande sonore enregistrée nous renseigne alors sur cette forme particulière de manipulation, notamment quand elle existe à travers le son des recréations enregistrées. D’abord, elle repose dans ce cas sur une esthétisation de la politique qui délaisse le moyen de l’art pour lui préférer une esthétisation du réel15 15 À propos de l’esthétisation de la politique par la propagande, voir TCHAKHOTINE, 1952 [1939]. . Ensuite, sa réception est orientée par le mythe de la vérité phonographique, qui vient soustraire la facticité de cette esthétisation à la critique pour la présenter comme le réel. Enfin, en montrant l’apparence neutre d’un réel véridique qui s’impose à toutes et tous par principe, les recréations manipulatoires du réel et leurs artifices franchissent les frontières de cultures politiques adversaires et d’espaces sociaux hostiles: la médiation fluide du son enregistré et de son support matériel, le disque, est à l’œuvre. C’est donc en occultant sa médiation première, par laquelle des enregistrements sont construits comme des instruments par des volontés d’agir, que le son enregistré et le disque existent auprès d’oreilles crédules en tant que médiateurs fluides des cultures politiques.

Il nous faut maintenant examiner des cas concrets de cette fluidité médiale pris tout au long du 20e siècle, en concentrant l’analyse sur les usages politiques de l’histoire par le disque, leur temporalité, et les cultures politiques ou les espaces sociaux qu’ils visent.

Unifier par l’émotion d’une histoire et d’une musique commune

En France, la propagande sonore enregistrée devient massive au cours des années 1930. À l’automne 1929, les propagandistes socialistes Compère-Morel et Jean-Lorris initient la maison de disques Ersa. En janvier 1930, l’entreprise dédiée à la rénovation de la propagande de la SFIO publie la série La Voix des Nôtres (discours). Elle inaugure ainsi un vaste catalogue (67 disques entre 1930 et 1935), dédié essentiellement à la propagande-éducation socialiste, et propose trois autres séries dont les publications débutent en 1930 et 1931: Les Chants du Monde du Travail (chansons); Hier et Demain (musique et discours); La Voix du Travail (discours de cadres de la Confédération générale du travail). Après sa faillite en juillet 1935, Ersa est remplacée par l’entreprise La Voix des Nôtres, qui consacre une production abondante (environ 65 disques et 55 rééditions entre 1935 et 1939, avec un pic de production en 1936) à la propagande du gouvernement socialiste de Front populaire. En 1931, Jacques Hébertot, royaliste, homme de théâtre et journaliste, commence à publier des disques pour la propagande de l’AF sous la marque Disques Hébertot (37 disques jusqu’en 1938). Son catalogue est conçu pour entretenir la flamme royaliste lors des réunions de l’AF, mais aussi pour tirer bénéfice de la crise politique, économique et sociale marquée par les émeutes insurrectionnelles du 6 février 1934. La Section française de l’Internationale communiste (SFIC), i.e. le Parti communiste français, se tourne également vers le disque. La marque Piatiletka – Le disque prolétarien (29 disques de 1932 à 1937) est déposée par la Coopérative ouvrière de TSF, une entreprise militante fondée en 1926 pour propager la pratique de la radio parmi les ouvriers français. Le catalogue Piatiletka sert surtout pour les campagnes électorales, municipales ou législatives, de 1932, 1935 et 1936. À partir de fin 1937, Piatiletka est remplacée par La Voix du Peuple (14 disques de 1937 à 1939), qui propose uniquement des rééditions du catalogue Piatiletka et des disques posthumes de Paul Vaillant-Couturier, décédé en octobre 1937. Alors que le Front populaire agonise, la propagande d’agitation qui avait accompagné la montée en puissance de la SFIC fait donc place à une propagande mémorielle.

Ces maisons de disques socialistes, royalistes et communistes ont produit la plupart des disques politiques des années 1930. Leur travail encourage sans doute des firmes généralistes, telles que Columbia, Pathé ou Odéon, à publier ponctuellement des disques de cadres de partis de gouvernement. Polydor propose ainsi des discours d’Édouard Herriot (Parti radical) ou d’André Tardieu (Alliance démocratique), enregistrés juste à temps pour la campagne des élections législatives de 193216 16 HERRIOT, Édouard, Discours prononcé par M. Édouard Herriot au banquet de Lyon du 12 avril 1932, Lyon: Polydor, 1932, 6 disques à aiguille 30 cm, 516.533 à 516.538; TARDIEU, André, Discours prononcé le 6 avril 1932, Paris: Polydor, 1932, 7 disques à aiguille 30 cm, 516.526 à 516.532. .

Outre des discours ou des chants politiques, ces disques à aiguille 78 tours proposent aussi des chants folkloriques, des danses, de la musique instrumentale, des textes déclamés ou de courtes scènes de théâtre pour une écoute, pas toujours très bonne, d’une durée de trois à cinq minutes. Vendus dans des pochettes cartonnées peu ou pas illustrées, ces disques d’un prix encore élevé s’adressent d’abord aux militants, mais aussi aux sections partisanes qui s’organisent pour les faire circuler d’une réunion politique à l’autre. Ils s’adressent ensuite à celles et ceux qui ne militent pas (encore) et que les partis essaient de recruter. En ce sens, les disques politiques des années 1930 sont souvent conçus pour fonctionner comme des médiateurs fluides d’une culture partisane. Et le type de contenu le plus souvent utilisé pour ce faire est musical. Déjà, en 1909, la première série discographique de la SFIO, rassemblant treize disques pour une opération éphémère baptisée Le phonographe socialiste, visait à «[populariser] les airs socialistes comme les autres». Il s’agissait ainsi de naturaliser ces chants pour en faire un matériau culturel populaire, circulant dans tous les espaces sociaux sans entraves idéologiques17 17 Le phonographe socialiste, l’Humanité, Paris, 23/11/1909, p. 1. . Vingt ans plus tard, la série Les Chants du Monde du Travail doit elle aussi résonner partout. Conçue pour circuler entre les militants du parti, elle est aussi assignée au «développement même de la ‘sensibilité socialiste’ des masses»18 18 LONGUET, Jean, La Propagande par la chanson, Le Populaire, Paris, 13/12/1930, p. 1. en s’appuyant sur une arme puissante de séduction:

Voyons d’abord pourquoi la collection des ‘Chants du Monde du Travail’ sera particulièrement appréciée par les militants du Parti. Nous dirons ensuite comment elle a été réalisée de telle sorte que nos adversaires comme nos amis ne puissent moins faire que de lui apporter leur tribut d’admiration, pour peu qu’ils admirent les beaux chants et la belle musique19 19 Pedro, Les Disques des ‘Chants du Monde du Travail’, Le Populaire, Paris, 31/07/1930, p. 4. .

En pratique, la musique ouvrirait des espace-temps esthétisés propices à des rencontres entre communautés militantes d’obédiences diverses. Sous l’emprise irrépressible de sa beauté, ces communautés, gouvernées par les mêmes émotions, se rallieraient alors au socialisme.

Pour que ce plan opérationnel enraciné dans l’imaginaire d’un universalisme émotionnel ne soit pas qu’une fabulation, il faudrait déjà que la qualité technique des enregistrements et des disques restitue le son musical avec une finesse suffisante pour que ses différentes composantes (mélodie, harmonie, timbre) touchent l’auditoire, et lui fasse ressentir de façon crédible les émotions politisées de la musique. En 1938, l’écrivain Robert Desnos aborde ce problème dans le journal communiste Ce Soir à propos de Le Chant du Monde (LCDM), une entreprise très proche de la SFIC, sans lien officiel avec le Parti mais publiant des disques conçus pour en diffuser la politique culturelle:

Le Chant du Monde poursuivant la série de ses intéressantes éditions nous donne trois disques de chants populaires et du folklore […] pour chant choral […]. Il faut louer un tel effort, non seulement en ce qui concerne le chant choral proprement dit, mais encore la chanson de folklore. On entend bien par-là que je n’attache pas seulement d’importance à la musique mais que les paroles aussi m’intéressent vivement et que j’aime les entendre intégralement. Le problème n’est pas si facile à résoudre qu’on pourrait le croire et Le Chant du Monde a grand mérite à vouloir le résoudre20 20 DESNOS, Robert, Les Disques, Ce Soir, Paris, 19/04/1938, p. 4. .

Voici esquissé l’enjeu que représente la technique phonographique pour une opération de politique culturelle mobilisant le disque comme un médiateur fluide des cultures politiques. En effet, le travail engagé par LCDM sur l’intelligibilité de sa musique enregistrée est une garantie de la préservation, voire de l’amplification, de la puissance politique de ses disques. On peut en déduire une autre qualité du disque, qui favorise son existence en tant que médiateur fluide: il est rendu moderne par une modernité technique que sa qualité sonore rend manifeste. Or, la qualité technique des enregistrements est l’un des points souvent discutés dans les chroniques discographiques de la presse des années 1930. Elle fait donc partie des critères gouvernant les achats de disques, et peut ainsi favoriser ou entraver leur circulation. Il convient donc d’apporter quelques précisions sur l’articulation de la politique culturelle du Parti communiste à la modernité du disque et aux médiations fluides de la culture politique qu’elle vise.

Fondée à la fin de 1937 par des membres et des sympathisants de la SFIC, LCDM publie un catalogue composé de quelques chants prolétariens et révolutionnaires, mais aussi et surtout de chansons folkloriques françaises sans référence politique. Celles-ci sont «[rendues] audibles aux oreilles modernes21 21 FRANCOTTE, Robert, Une conférence sur les chants du folklore, L’Art Musical Populaire, Paris, 03/1939, p. 4. », c’est-à-dire arrangées et harmonisées, par des compositeurs – et une compositrice – français, membres de la Fédération musicale populaire (FMP). Créée en 1937 dans une France encore gouvernée par le Front populaire, la FMP est l’une des institutions culturelles communistes nées du développement de l’Association des écrivains et artistes révolutionnaires, fondée en 1932. Il s’y élabore la partie musicale de la politique culturelle de la SFIC, caractérisée par la conception d’une musique à la fois populaire et exigeante, modernisant le folklore français pour offrir au peuple une mise à jour toute politique de son essence esthétique. Les arrangements de ces chansons donnent à entendre de brèves histoires populaires, mises en scène par la musique pour susciter des associations de représentations et d’affects correspondant aux valeurs humanistes promues par la SFIC (THOMAS, 2017THOMAS, Jonathan. De la musique pour le peuple: une proposition d’analyse des premiers disques folkloriques du Chant du Monde. Analitica – Rivista online di studi musicali, v. 10, 2017. Consultable en ligne: http://lnx.gatm.it/analiticaojs/index.php/analitica/article/view/107/120.
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). Cette réactualisation du folklore à travers des esthétiques contemporaines installe celui-ci dans son rôle d’agent politique du présent. Elle ne pourrait fonctionner sans que les nouveaux timbres de l’orchestre soient correctement restitués par un disque moderne, offrant toute sa puissance technique à une écoute la plus émotionnelle et séduisante possible. La médiation fluide de la culture communiste repose donc sur la médiation technique d’une modernité musicale.

Cela suggère que la qualité véritative du son enregistré pourrait aussi participer de la fluidité médiale des disques folkloriques de LCDM. Dans Le Figaro, le compositeur et critique Stan Golestan écrit que le but de l’entreprise est de «[tendre] à la diffusion désintéressée et plus étendue du chant populaire de nos provinces, but vivant et documentaire méritant les plus intensifs encouragements22 22 GOLESTAN, Stan, Concerts et récitals, Le Figaro, Paris, 18/04/1938, p. 6. ». Les disques LCDM ne sont donc pas perçus comme des recréations politisées d’un patrimoine folklorique, mais comme des documents de ce patrimoine. Le disque participe, là encore, à naturaliser des sons et à en faire des agents de la vérité.

Cet effet du support discographique est décisif dans le cas des disques relatifs à l’histoire et à la mémoire des mouvements politiques. Dans les années 1930, ces disques proposent des témoignages racontés par leurs auteurs, ou des lectures de documents historiques par des acteurs. Bien qu’ils appartiennent au domaine de l’histoire et en tirent leurs effets, ces enregistrements s’inscrivent dans une temporalité similaire à celle des enregistrements de discours de personnalités partisanes en activité qui, dans le cas des disques de La Voix des Nôtres, portent sur la doctrine ou l’histoire de la SFIO, ou, dans le cas des disques communistes Piatiletka, sur les thèmes propres à une campagne électorale: il s’agit toujours d’enregistrements qui, en pratique, réactualisent un passé quasi-présent. Or, ce premier jeu temporel détermine les possibilités opératoires immédiates du disque politique. Lorsque ses premiers catalogues des années 1930 paraissent, ce passé quasi-présent est opéré comme le moyen d’introduire la vie de l’orateur prestigieux, à la présence rare, dans un grand nombre de foyers et de réunions partisanes. Bien qu’il soit parfois considéré comme un média du passé par ses producteurs, le disque politique est présenté au début des années 1930 comme un objet «d’avant-garde», détenteur d’un surplus de puissance d’agir dans le présent23 23 Contrairement à la radio, le disque n’est pas un média du direct, et Compère Morel sent son manque d’actualité (Compére-Morel a fait une causerie sur ‘le Journal moderne’ hier soir à ‘Radio-Populaire’, Le Populaire, Paris, 01/12/1932, p. 3). Sur le disque comme objet d’avant-garde, voir Le Populaire, Paris, 13/05/1931, p. 5. . En somme, le passé quasi-présent de l’enregistrement, quand il est pris dans un événement en construction comme une campagne électorale ou la modernisation de la propagande par le disque, semble surtout reçu par ses auditoires comme l’ajout des sons de la vie, du présent, voire du futur, à l’élaboration politique d’un avenir collectif.

Ainsi, il semble que la parole historique de témoins encore vivants n’appartienne pas seulement aux champs temporels de l’histoire et de la mémoire, mais aussi à celui de l’actualité. Par la performance de son témoignage, le témoin peut transmettre un passé directement, en s’en rappelant comme si c’était hier. L’histoire semble alors un présent en train d’arriver. Sa médiation par la voix d’un vivant la rend captivante, émouvante ou trépidante comme n’importe quel autre récit d’aventures. Pour Paul Ricœur, cette «représentation du passé par récit» est présentée par le témoin comme une preuve. Celui-ci déclare par son témoignage: «1) J’y étais; 2) Croyez-moi; 3) Si vous ne me croyez pas, demandez à quelqu’un d’autre» (RICŒUR, 2003RICŒUR, Paul. La mémoire, l’histoire, l’oubli. Paris: Points, 2003 [2000]. [2000], p. 201, 364). Le témoin propose ainsi à son auditoire un contrat de confiance non pas basé sur une appartenance partisane commune, mais, armé de sa connaissance de faits précurseurs et donc explicatifs du présent, sur ce qui relie les individus entre eux pour qu’ils fassent société:

Ce qui fait institution, c’est d’abord la stabilité du témoignage prêt à être réitéré, ensuite la contribution de fiabilité´ de chaque témoignage à la sûreté´ du lien social en tant qu’il repose sur la confiance dans la parole d’autrui. De proche en proche, ce lien fiduciaire s’étend à tous les échanges, contrats et pactes, et constitue l’assentiment à la parole d’autrui, principe du lien social, au point qu’il devient un habitus des communautés considérées, voire une règle de prudence: d’abord faire confiance dans la parole d’autrui, ensuite douter si de fortes raisons y inclinent.

(RICŒUR, 2003RICŒUR, Paul. La mémoire, l’histoire, l’oubli. Paris: Points, 2003 [2000]. [2000], p. 207)

Le disque, parce qu’il peut se répéter indéfiniment mais aussi parce qu’il témoigne du témoin, est un médiateur idéal pour «faire institution» d’un témoignage historique, et donc disséminer ce récit au-delà de son champ culturel d’origine. Le disque de témoignage présente une prédisposition particulière à exister comme un médiateur fluide de signes partisans.

Et cette prédisposition est encore renforcée par l’attrait que sa modernité technique et l’assurance d’une reproduction sonore fidèle exercent sur ses auditoires. Par exemple, la qualité d’enregistrement des disques de La Voix des Nôtres, premiers disques politiques des années 1930, est saluée par la critique. Pour Paul Allard, critique de la revue spécialisée L’Édition Musicale Vivante, Léon Blum y est «élégant, subtil et très ‘conseiller d’État’»; Léon Jouhaux y est «tonitruant», et «l’accent méridional» de Vincent Auriol y est «parfaitement phonographié»24 24 ‘La Voix des Nôtres’ et la critique, Le Populaire, Paris, 12/03/1930, p. 1. . Or, la fidélité de cette reproduction est un support pour établir une relation précieuse entre l’orateur et son auditoire; une relation de confiance, comme le suggère une autre critique, signée par Robert Simon:

Chacun des dix-huit grands leaders du parti socialiste vient exposer avec clarté et sobrement ses convictions. Leurs voix, que le microphone a souvent respectées, nous révèlent magiquement, parce qu’elles sont sincères et sans apprêt, le caractère intime de chacun des orateurs qui défendent quotidiennement les idées qui nous sont chères25 25 La ‘Voix des Nôtres’ devant la critique, Le Populaire, 5/06/1930, p. 4. .

Dans cette confiance placée dans les paroles «sincères» des orateurs socialistes, on peut discerner la manifestation du mythe de la vérité phonographique, qui dévoile tout du réel et en déjoue les mauvais tours. Simon dénonce en creux de potentiels artifices oratoires en saluant des exposés sobres. Ce faisant, il soupçonne l’orateur d’être l’auteur d’une manipulation par l’émotion que provoquerait l’artifice; manipulation que son enregistrement rendra évidente. Cet aspect du mythe de la vérité phonographique est décisif pour la fluidité médiale du disque politique de témoignage, car il neutralise ce qui pourrait entraver sa circulation: la reconnaissance d’un témoignage insincère, truqué pour émouvoir et servir des intérêts partisans ou personnels plutôt que le bien communautaire. Parmi les disques de La Voix des Nôtres, on trouve les témoignages de Compère-Morel et de Pierre Renaudel, cadres historiques de la SFIO. Chacun relate les derniers instants de l’une des deux figures historiques du parti: Jules Guesde et Jean Jaurès26 26 RENAUDEL, Pierre, L’Assassinat de Jaurès, Paris: Ersa, 1930, disque à aiguille 25 cm, 101; COMPÈRE-MOREL, Adéodat, Jules Guesde sur son lit de mort, Paris: Ersa, 1930, disque à aiguille 25 cm, 102 (5002) (Écoute 1. Disponible sur: http://www.phonobase.org/11049.html). COMPÈRE-MOREL, Adéodat, Une belle page de Guesde, Paris: Ersa, 1930, disque à aiguille 25 cm, 102 (5003) (Écoute 2. Disponible sur: http://www.phonobase.org/11050.html). . Le témoignage de Renaudel, présent lors de l’assassinat de Jaurès, est très remarqué par Allard et Simon. Allard y entend une émotion véritable: «M. Pierre Renaudel, premier historien de l’ébonite, y a gravé le récit le plus sobre, le plus pathétique, le plus poignant d’un évènement historique27 27 ‘La Voix des Nôtres’ et la critique, Le Populaire, Paris, 12/03/1930, p. 1. .» La sobriété de Renaudel est également remarquée par Simon, et rend son témoignage plus puissant encore: «À Pierre Renaudel fut réservée la belle et noble tâche d’évoquer Jaurès. En phrases dont la simplicité fait toute la puissance d’une voix qu’une douleur inépuisable fait trembler encore, il nous décrit la mort du grand tribun que le geste d’un fou fit tomber le 31 juillet 191428 28 La ‘Voix des Nôtres’ devant la critique, Le Populaire, Paris, 5/06/1930, p. 4. ». Cette puissance d’émotion, produit de l’association de l’éloquence de Renaudel à la modernité technique du disque reproducteur, est bien une dimension constitutive de la fluidité médiale du disque politique de témoignage. Allard tranche: «Qu’on soit favorable ou hostile au socialisme, il est impossible de ne pas être serré à la gorge en entendant, au milieu du recueillement et du silence, cette simple évocation des heures tragiques de la mobilisation29 29 ‘La Voix des Nôtres’ et la critique, Le Populaire, Paris, 12/03/1930, p. 1. ».

Si l’émotion survenant par l’écoute vient confirmer la vérité du récit historique, et se montre ainsi comme la clé qui ouvre les portes de tous les champs culturels et partisans, que se passe-t-il lorsque l’histoire n’est pas transmise par un témoignage, mais par une recréation sonore, ou du moins par une médiation esthétique ? À l’été puis à l’hiver 1932, le comédien et homme de radio George Colin enregistre pour Disques Hébertot deux disques relatifs à la mort de Louis XVI et de son épouse. Le premier comprend Le Testament de Louis XVI et La dernière lettre de Marie-Antoinette. Il est le produit d’une médiation esthétique opérée sur les textes originaux par la voix de Colin. Le second est une recréation partielle du procès de Louis XIV, dont Colin joue, avec dialogues, les parties de l’interrogatoire du roi et de la plaidoirie de Raymond de Sèze, son avocat30 30 COLIN, Georges, Testament de Louis XVI, Paris: Disques Hébertot, 1932, disque à aiguille 30 cm, EY-4.003, Face A (Écoute 3. Disponible sur: https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1082253t/f1.media); COLIN, Georges, Dernière lettre de la Reine Marie-Antoinette à Madame Elisabeth, Paris: Disques Hébertot, 1932, disque à aiguille 30 cm, EY-4.003, Face B (Écoute 4. Disponible sur: https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1082253t/f2.media). COLIN, Georges, Le Procès de Louis XVI: I. L’interrogatoire, Paris: Disques Hébertot, 1932, disque à aiguille 30 cm, EY-4.004, Face A (Écoute 5. Disponible sur: https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k10822458/f1.media). COLIN, Georges, Le Procès de Louis XVI: II. Plaidoirie de De Sèze, Paris: Disques Hébertot, 1932, disque à aiguille 30 cm, EY-4.004, Face B (Écoute 6. Disponible sur: https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k10822458/f2.media). . Or, l’appartenance de ces disques à un catalogue discographique de propagande laisse présager que les lectures qu’ils proposent, qualifiées par le critique royaliste Dominique Sordet de «simples31 31 SORDET, Dominique, En marge du Grand Prix, Candide, Paris, 6/04/1933, p. 15. », soient mises en forme pour dégager un sentiment de tristesse, de lamentation. L’écoute du premier disque provoque en effet une émotion puissante chez les militants de l’AF, comme le raconte l’écrivain, orateur et polémiste royaliste Léon Daudet, ami d’Hébertot:

Je demandais qu’on mît sur l’appareil les récentes innovations d’Hébertot, et, pour commencer, le testament de Louis XVI, lu par M. Georges Colin. Ce texte sublime, qui est un des plus nobles et émouvants morceaux de la langue française, fut écouté´ dans un pieux recueillement. Nous revivions, par la parole de ce Roi trop débonnaire et qui ne sut pas réprimer, les heures tragiques de la Révolution, la hideuse levée d’idées absurdes déchaînant des passions sauvages, les angoisses, puis le supplice de la famille royale enfermée au Temple, la décapitation du pays dans son souverain [...]. Quand ce fut achevé, tout le monde pleurait. La pitié, mais aussi la résolution, la douleur rétrospective, mais aussi – et en dépit du pardon royal – la volonté´ de réparer se lisaient sur ces visages ardents, jeunes et vieux, que transportait la foi royaliste, c’est-à-dire, en somme, la foi française32 32 DAUDET, Léon, La Propagande par le disque, L’Action Française, Paris, 20/06/1932, p. 1. .

La description de cette émotion saisissante montre bien la valeur politique de ces enregistrements, dont l’écoute débouche sur une mobilisation militante tout imprégnée de «foi royaliste». Par conséquent, leur puissance émotionnelle pourrait limiter leur circulation sociale en révélant inévitablement leur caractère royaliste. En effet, l’interprétation de Colin esthétise les textes lus et augmente leur capacité à émouvoir. Au sujet du disque de recréation du procès de Louis XVI, Sordet relève à propos de Colin: «l’aisance avec laquelle sa voix s’inscrit dans la cire, son expérience du microphone, son solide métier d’acteur confèrent un relief singulier à ces lectures dont j’admire la haute tenue et la belle qualité typographique33 33 SORDET, Dominique, Le phonographe, L’Action Française, Paris, 10/12/1932, p. 4. ». Cette médiation esthétique émouvante pourrait passer pour celle d’un agir politique. Au contraire, Sordet considère qu’elle procède d’une vérité rendue incontestable:

Mais le document le plus émouvant de la collection est, à mon avis, le Testament de Louis XVI lu par M. Colin, paroles vraiment royales. Avec l’Histoire de la Révolution, de Pierre Gaxotte, ce disque, qui ne se recommande que de la simple vérité, est un des contrepoisons les plus efficaces qu’on puisse opposer aux trucages de l’enseignement officiel34 34 SORDET, Dominique, Échos du royaume de France, L’Action Française, Paris, 24/06/1932, p. 4. .

Il n’est pas anodin que Sordet associe ce disque à l’œuvre de Pierre Gaxotte, journaliste, historien, membre de l’AF et très proche de Charles Maurras. Le disque, procédant de l’exactitude relative à la science, est réaffirmé comme un agent de la vérité en étant montré à la hauteur de la scientificité de la démarche de l’historien. Mais quand le disque est émouvant, il possède un atout supplémentaire: la vérité scientifique qu’il propose est confirmée par la vérité de l’émotion que l’on ressent à son écoute. Cette émotion s’affirme comme un agent décisif de la fluidité médiale du disque historique, qu’il soit de témoignage ou de recréation. Sordet en est convaincu: le testament enregistré de Louis XVI doit être entendu dans les écoles pour neutraliser un enseignement politiquement situé et rétablir la vérité historique. Certes, son engagement politique est si fort qu’il semble se confondre avec l’évidence et ôter au disque sa partialité. Mais le critique attribue à l’association disque-histoire-émotion une telle puissance de vérité qu’elle s’imposerait dans n’importe quel espace culturel ou social, sans restriction de circulation due à son caractère partisan.

Dans une des Brochures d’Éducation Nouvelle Populaire, publiée en décembre 1938, les disques enregistrés par Colin apparaissent dans la catégorie des disques recommandés pour l’apprentissage de l’histoire et de la géographie à l’école. Il est donc possible que Sordet ait reçu cette mention comme une confirmation réjouissante de sa critique. Appartenant à «l’extrême-gauche pédagogique», les Brochures d’Éducation Nouvelle Populaire ont été lancées en 1937 par le communiste Célestin Freinet, partisan d’une éducation émancipatoire (ORY, 2016ORY, Pascal. La Belle illusion. Culture et politique sous le signe du Front Populaire, 1935-1938. Paris: CNRS Éditions, 2016 [1994]. [1994], p. 670). L’utilisation du disque dans le cadre de cours d’histoire et de géographie est expliquée comme suit:

Nous avons réuni sous ce titre un ensemble de disques qui veulent être une application de la formule: ‘Le disque ne remplace ni le maître, ni le livre; il est un auxiliaire précieux du premier, et le complément indispensable du second.’ Ces disques sont des ‘documents sonores’, ils sont destinés à l’’illustration’ de vos exposés. Vous les utiliserez exactement comme vous utilisez le film ou la gravure35 35 PAGÈS, Y.; PAGÈS, A., Disques et phonos, Brochure d’Éducation Nouvelle Populaire, Paris, 12/1938, n. 13, p. 11. .

Outre les disques de Colin, on trouve également des disques relatifs à la Commune produits pour la SFIO par Ersa, ainsi que le témoignage de Renaudel sur la mort de Jaurès. Si la présence de disques socialistes dans cette brochure est compréhensible au regard de son orientation politique, elle montre néanmoins la capacité de contenus créés pour la propagande partisane à passer pour de simples «documents» illustratifs d’une histoire, soustrayant leur politisation à tout discours critique. Ce faisant, ils illustrent la fluidité médiale du disque d’histoire, lequel apparait comme un virus lorsqu’il provient d’un camp idéologique ennemi. Ainsi, les documents historiques rendus audibles par la médiation esthétique de Colin sont certes des documents, mais aussi des tentatives de susciter une adhésion militante par la compassion pour la figure d’un martyr. Ils fonctionnent sur le même mode que le témoignage de Renaudel. Et leur fonctionnement comme document au sein du cours d’histoire ne peut éteindre, s’il n’est pas l’objet d’une prévention pédagogique, l’autorité du disque qui, détenant une vérité émouvante, reste libre de s’exercer sur des oreilles non averties. Le disque apparaît donc comme un médiateur particulièrement pernicieux quand il transmet l’histoire comme un récit des origines d’une configuration malheureuse du présent, et qu’il suggère par ce récit quelques esquisses des moyens d’en sortir.

Le temps passant, un nouveau jeu temporel devient possible. Le disque étant toujours porteur d’une archive, le passé quasi-présent qu’il porte en premier lieu appartient de plus en plus à l’histoire. Le disque devient lui-même un document historique, ou du moins l’objet palpable des sons qu’il véhicule et qui sont des traces de l’histoire. Il faut maintenant faire un saut dans le temps et examiner la fluidité médiale du disque-document historique. Elle se renouvelle en même temps que la forme du disque, après la Seconde Guerre mondiale.

Le recyclage sonore et la possibilité d’un travail politique massif des mémoires

À partir de la fin des années 1940, le disque à aiguille 78t est progressivement remplacé par les disques vinyles microsillon de 30 cm de diamètre, joués le plus souvent à la vitesse de 33 tours/minute, et de 17 cm, lus le plus souvent à la vitesse de 45 tours/minute. Ces disques proposent une excellente qualité sonore, et une durée d’écoute maximale d’environ 20 minutes par face pour le disque de 30 cm, et d’environ 5 à 7 minutes par face pour le disque de 17 cm, selon qu’ils soient lus à la vitesse de 45 ou de 33 tours/minute. Leurs pochettes renseignent leur contenu, une illustration étant le plus souvent présentée au recto et un texte de présentation et/ou diverses informations au verso. La pochette du disque de 30 cm offre un vaste espace d’information. Elle peut parfois se déplier et accueillir un livret, celui-ci comprenant, par exemple, des traductions de chansons ou de discours, des informations biographiques, des notes historiques, etc.

Ce faisant, le disque existe à l’intersection des champs médiatiques de l’image, du texte et du son. Sa socialisation change en raison de cette puissance de communication sans précédent, mais aussi de l’abondance de sa production et de son faible coût d’acquisition. Le disque microsillon de 30 cm apparaît ainsi comme un moyen de propagande beaucoup plus efficace que le disque à aiguille des années 1930. Le disque de 17 cm est également utilisé à cette fin, souvent lors d’opérations ponctuelles, bien que récurrentes. Il sert par exemple lors de campagnes électorales comme celles des législatives de 1973 et 1978, qui donnent lieu à nombreuses publications par les maisons Unitélédis (socialiste) et Uni/Ci/Té (communiste). Le disque 33 tours de 30 cm semble toutefois le format le plus utilisé pour diffuser une propagande au long cours par la musique, mais aussi, comme nous le verrons, par le son de l’histoire36 36 Reprenant puis développant son activité après la guerre, Le Chant du Monde est pour sa part un exemple remarquable de propagande par le disque de musique (ALTEN, 2012). .

Déjà présent pendant l’entre-deux-guerres dans les catalogues de firmes généralistes telles qu’Odéon ou Columbia, le disque d’histoire se développe après 1945 à travers des collections publiées par Decca, Philips, Hachette-Ducretet-Thomson ou Pathé-Marconi (THOMAS, 2020THOMAS, Jonathan. La propagande par le disque. Jean-Marie Le Pen, éditeur phonographique. Paris: Éditions de l’EHESS, 2020. Doi: https://doi.org/10.4000/books.editionsehess.27508.
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, p. 183-184). Surtout, la constitution intermédiale nouvelle du disque le fait apparaitre sous de nouvelles formes, comme celle des magazines d’actualités et d’histoire Sonorama (1958-1962) ou Spécial Sonore (1964-1970), dont certaines des pages sont des disques flexibles d’un diamètre d’environ 18 cm. Ces disques et ces magazines sont l’occasion d’une diffusion élargie de l’histoire sonore, dont les propriétés qui lui sont reconnues procèdent encore du mythe de la vérité phonographique. Une édition de 1964 de Spécial Sonore, consacrée à la Libération, propose cette introduction:

La France célèbre cette année le vingtième anniversaire de sa libération. La Page sonore fixe et ressuscite pour vous cet événement et ceux de la guerre, uniquement dans ce qu’ils eurent d’essentiel sans pouvoir prétendre à plus: synthèse et résonnance des grandes heures de l’Histoire. L’âme de ces évènements s’inscrit en paroles, en sonorités évocatrices dans les sillons de ‘Spécial Sonore’. Leur authenticité garantit la valeur indiscutable de témoignage et de pérennité. Certes les techniques sonores d’il y a vingt ans n’avaient pas encore – et de loin – atteint la perfection de celles d’aujourd’hui. […] Mais ce n’est point de perfection auditive qu’il s’agit, c’est de vérité prise au vif de l’Histoire, une Histoire qui ne se figera jamais, parce qu’elle garde les accents de ses propres acteurs – sombres ou lumineux37 37 L’histoire vivante à l’heure de la Page sonore, Spécial Sonore, Paris: n. 3, mai-juin 1964, p.1. .

Cette «vérité prise au vif de l’Histoire» se présente ici comme une occasion d’expérienciation d’événements passés à travers leurs enregistrements sonores, et possède ainsi un attrait qui fait de la communication sonore de l’histoire une marchandise destinée au grand public: le disque propose désormais de réactualiser le passé à travers les sensations et les émotions suscitées par l’écoute de ses sons. Ce changement est abordé par l’homme de télévision et de radio Jean Thévenot, qui consacre ses trois chapitres de L’Histoire et ses méthodes, un ouvrage collectif paru dans la Bibliothèque de la Pléiade en 1961, à l’irruption du sonore dans le travail historique. Thévenot considère que les progrès des technologies du son pourraient d’abord orienter les démarches historiennes vers «l’image sonore et non plus le mot écrit» (THEVENOT, 1961THéVENOT, Jean. Les machines parlantes. In: SAMARAN, Charles (ed.). L’histoire et ses méthodes: recherche, conservation et critique des témoignages. Paris: Gallimard, 1961., p. 809), notamment en raison de sa dimension sensible. En effet, à travers le son «renaît une apparence de la vie éteinte» (p. 802). Or, cette renaissance devient de plus en plus accessible après-guerre. Thévenot note que:

Si l’on y réfléchit bien, pour l’usager moyen c’était auparavant un lieu commun tout théorique d’affirmer que l’histoire était désormais gardée vivante par l’enregistrement et pouvait à tout moment renaître de ses cendres. En fait, cet usager n’avait pas l’accès facile aux archives sonores, publiques ou privées. Il l’a maintenant avec les magazines sonores qui substituent les voix, les bruits et la musique aux mots et aux images imprimées pour écrire la chronique de notre temps.

(THEVENOT, 1961THéVENOT, Jean. Les machines parlantes. In: SAMARAN, Charles (ed.). L’histoire et ses méthodes: recherche, conservation et critique des témoignages. Paris: Gallimard, 1961., p. 817)

Cette accessibilité nouvelle est cruciale pour les usages politiques de l’histoire sonore. Le plus grand nombre peut désormais s’imaginer comme témoin direct de l’histoire, se forger un avis sur l’événement entendu, en extraire une vérité comme s’il était une matière brute, alors que sa mise en forme est invisibilisée par le mythe de la vérité phonographique et n’a pas fait l’objet d’une investigation critique par un historiographe. Au début des années 1960, un large champ de manipulation, basé sur la réactualisation sonore du passé, est donc ouvert à une propagande qui peut déjà profiter de la puissance marchande et de la configuration nouvelle de l’album discographique. Ce champ est pleinement investi pendant une vingtaine d’années par la Société d’études et de relations publiques (Serp), que fonde l’ancien député d’extrême droite Jean-Marie Le Pen avec quelques amis en février 196338 38 Ce paragraphe et le suivant évoquent l’histoire de la Serp en s’appuyant sur BRESSON & LIONET, 1994. .

À sa création, la Serp devait être une entreprise travaillant dans le domaine des relations publiques et servir à Le Pen, alors sans emploi, de moyen de subsistance. Cependant, Le Pen se trouve rapidement en échec dans ce premier domaine d’activité et décide de la reconvertir en une maison de disques, dont la plupart des publications serviront à la propagande de l’extrême droite. Cette idée lui vient alors que se tiennent les procès de l’Organisation de l’armée secrète (OAS), un groupe militaire et terroriste qui refuse l’indépendance tout juste acquise par l’Algérie. Le Pen, également militant d’une Algérie française, est proche de certains de ses membres et suit ces procès avec attention. Or, Jean-Louis Tixier-Vignancour, ancien membre du gouvernement de Vichy, enregistre clandestinement la plaidoirie qu’il prononce pour défendre le général Salan, chef de l’OAS. Cet enregistrement est édité sur un disque de la marque La Voix de l’Auteur, dont le stock est récupéré puis rapidement vendu par Pierre Durand, associé et ami de Le Pen39 39 L’enregistrement d’un procès est alors interdit en France. Le disque évoqué est: TIXIER-VIGNANCOUR, Jean-Louis, Plaidoirie pour Salan, Paris: La Voix de l’Auteur, 1962, disque microsillon 30 cm, LVA 1001/2. Voir THOMAS, 2020, p. 15-16. . Remarquant ce succès, ce dernier décide de publier les bandes clandestines d’un autre procès relatif à l’OAS, puis d’élargir le catalogue de la Serp pour atteindre d’autres communautés d’extrême droite. Sous la direction de Le Pen pendant vingt ans, la Serp publie un catalogue de 180 disques consacrés principalement à l’histoire des mouvements et des régimes d’extrême droite français et européens, à la Seconde Guerre mondiale, aux armées françaises et étrangères40 40 Le Pen a quitté la direction de la Serp au milieu des années 1980. Il a été remplacé par Paul Robert, qui en 1992 a cédé sa place à Marie-Caroline Le Pen, la fille aînée de Jean-Marie Le Pen. Sous sa direction et celle de Robert, la Serp délaisse les disques d’histoire et met en avant les musiques militaires, les chansons traditionnelles, les musiques sacrées et les chants politiques contemporaines promouvant le nationalisme, le racisme, le royalisme ou le FN. La Serp a disparu en 2000 après une dispute politico-familiale entre le premier patron de la Serp et sa fille. . Pour cela, il mobilise des enregistrements originaux, mais aussi et surtout de nombreux documents historiques sonores, parfois contextualisés par des commentaires parlés (certains écrits et/ou dits par Le Pen ou Durand). Ces documents sont articulés à d’anciennes photographies et affiches de propagande, à des textes de présentation écrits par Le Pen, son entourage politique, ou des témoins des sujets historiques abordés, ou aux transcriptions et traductions des discours et des chants présents sur les disques.

Par cet appareil de contextualisation et le nombre de disques produits, la Serp représente un cas unique en France d’usages politiques répétés des sons de l’histoire. Cependant, l’entreprise n’est jamais décrite par son patron comme une maison de disques politiques. Mis en cause à plusieurs reprises par la société civile pour avoir publié des documents sonores fascistes ou nazis, Le Pen se présente comme un simple éditeur phonographique qui effectue un travail honnête d’historien (THOMAS, 2020THOMAS, Jonathan. La propagande par le disque. Jean-Marie Le Pen, éditeur phonographique. Paris: Éditions de l’EHESS, 2020. Doi: https://doi.org/10.4000/books.editionsehess.27508.
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, p. 8-9, 59, 146). Pour survivre, la Serp, dont l’économie n’est guère florissante, doit s’adresser à son premier public, celui des diverses communautés formant le champ de l’extrême droite en France, tout en soignant l’apparence de ses productions. Il s’agit d’éviter que leurs appartenances politiques, largement détestées et combattues, soient trop explicites pour ne pas entraver les activités commerciales de l’entreprise, et politiques de son patron. Les disques de la Serp et le catalogue qu’ils constituent sont ainsi soumis à la nécessité d’être les médiateurs fluides des cultures politiques qu’ils véhiculent. L’entreprise remplit cette obligation en tirant profit de l’intermédialité de l’album discographique. Elle joue du mythe de la vérité phonographique aussi bien avec des enregistrements proposant un passé quasi-présent, qu’avec ceux dont le temps a changé le statut social pour leur donner celui d’archives. C’est à partir d’eux que la Serp diffusera un discours sur l’histoire sonore organisant la fluidité médiale de ses disques.

Les premiers disques de la Serp, relatifs au procès de Jean Bastien-Thiry pour l’attentat du Petit-Clamart et vendus dans son sillage, procèdent d’un passé quasi-présent. Traces d’une actualité encore chaude, ces disques sont susceptibles de stimuler la mobilisation des militants pro-Algérie française, ainsi que de susciter la curiosité d’un public moins politisé, mais attentif à l’événement qu’ils documentent. Cette curiosité peut être renforcée par l’assurance que la capture de l’événement est de bonne qualité, grâce au magnétophone à bande qui rend parfaitement intelligibles les paroles prononcées et l’acoustique de la salle du procès (BOUZARD, 2014BOUZARD, Thierry. Des chansons contre la pensée unique. Paris: Éditions des Cimes, 2014., p. 306)41 41 Ce livre, qui explore les musiques circulant dans l’extrême droite française, est lui-aussi marqué à l’extrême droite. . L’usage de magnétophones enregistreurs à bande à partir du début des années 1950 a permis de multiplier les enregistrements d’événements divers. Leur qualité sonore est bien meilleure que celle des enregistreurs à disques utilisés en France pour capter de grands rassemblements politiques au milieu des années 193042 42 Écouter par exemple: BLUM, Léon; BASCH, Victor, Rassemblement populaire du 14 juillet 1936, Paris: Ligue des droits de l’homme et du citoyen, 6 disques à aiguille 25 cm. Consultable en ligne: https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1081535m, consulté le 30/06/2022. . Ainsi, la Serp aurait pu profiter de la liberté et de la qualité offertes par ces dispositifs d’enregistrement pour varier sa production documentaire, et opérer une subtile propagande d’agitation à partir d’autres événements. Elle aurait pu porter cette propagande auprès de nouveaux publics grâce à l’attrait des actualités sonores, et faire reposer la fluidité médiale nécessaire à ses disques sur l’offre d’un passé quasi-présent de bonne qualité. Cependant, après la publication en 1964 d’une histoire des quatre dernières années de la Guerre d’Algérie, cette pratique est abandonnée au profit de la production de disques historiques compilés à partir d’enregistrements datant pour la plupart des années 1930 et 1940, et glanés par le collectionneur José Sourillan. Ce faisant, Le Pen, très impliqué dans la confection des disques et du catalogue, ouvre à sa pratique un panorama de thématiques historiques et politiques aussi large que l’étaient les productions discographique et radiophonique de cette période. La Serp publie, par exemple, des disques sur le fascisme italien, l’AF, le IIIe Reich et les corps d’armée nazis, la Guerre d’Espagne, la Seconde Guerre mondiale, des anthologies des discours du maréchal Pétain, de Philippe Henriot, de Pierre Laval, ou d’Adolf Hitler.

Tous ces disques sont présentés comme les produits d’une démarche historienne sincère, impartiale et objective, attestée par l’effet de réel du son enregistré, et donc dépourvue de toute volonté d’agir en politique. C’est pourtant en construisant son catalogue comme un éventail des idéologies d’extrême droite que Le Pen préfigure sur le plan symbolique ce qu’il tentera bientôt de faire avec le Front national, le parti qu’il préside dès sa fondation en 1972: fédérer des communautés dispersées d’extrême droite, pour accéder au pouvoir par les urnes (MILZA, 1994MILZA, Pierre. Le Front National crée-t-il une culture politique? Vingtième Siècle. Revue d’Histoire, Paris, Presses de Sciences Po, n. 44, p. 39-44, octobre-novembre 1994. Doi: https://doi.org/10.3406/xxs.1994.3109.
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, p. 43). La perspective œcuménique dans laquelle s’inscrit ce projet fait écho à la diffusion d’une vérité historique commune à toutes et tous. En opérant l’histoire pour mieux opérer la mémoire, Le Pen se fait l’auteur d’une action profonde, radicale, fondée sur la pénétration possible de signes idéologiques dans tous les espaces culturels, sociaux et partisans par leur déguisement en signes historiques. Voilà qui rend par exemple possible la promotion dans le Guide Juif, au début des années 1970, d’un disque de la Serp sur l’histoire d’Israël et du peuple juif omettant la Shoah (THOMAS, 2020THOMAS, Jonathan. La propagande par le disque. Jean-Marie Le Pen, éditeur phonographique. Paris: Éditions de l’EHESS, 2020. Doi: https://doi.org/10.4000/books.editionsehess.27508.
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, p. 50)43 43 Le disque mentionné est: Collectif, Histoire d’Israël: Voix et chants, Paris: Serp, 1970, disque microsillon 30 cm, HF26. . Ce déguisement est rendu possible par l’évolution des anciens enregistrements de propagande que le temps a dégagé de leur fonction d’agitation pour leur conférer un statut social d’archive. Ainsi, les disques d’histoire de la Serp mobilisent par exemple des chants et des discours initialement publiés par les maisons Ersa et La Voix des Nôtres pour constituer un album sur Léon Blum, ceux de l’Association phonique des grands artistes et de Disques Hébertot pour un disque sur l’AF, ou ceux de Piatiletka et de France-Libère-Toi pour un disque sur Jacques Doriot, ancien cadre du Parti communiste devenu fondateur et président du Parti populaire français (extrême droite) en 193644 44 BLUM, Léon; DURAND, Pierre, Léon Blum: Discours politiques, Paris: Serp, 1971, 2 disques microsillon 30 cm, HF31; Collectif, L’Action française: Voix et chants, Serp, 1967, disque microsillon 30 cm, HF16; Collectif, Jacques Doriot: Discours, allocutions, chants Serp, 1968, disque microsillon 30 cm, HF19. .

Sur cette base, les disques de la Serp font circuler des documents de propagande présentés comme des documents historiques par les textes de pochette et les commentaires, mais dont la place dans le système de signes texte/image/son de l’album leur permet de fonctionner à nouveau comme des documents de propagande. Ils pourront servir les différentes stratégies dont l’entreprise est l’objet ou la médiatrice. Par exemple, le disque consacré à la vie politique de Léon Blum (1929-1947), est perceptible comme une documentation exceptionnelle sur un acteur majeur de l’histoire récente française, ou comme un objet mémoriel pour des sympathisants du socialisme. Ce dernier usage, incohérent avec les idées promues par le catalogue de la Serp, est cependant utile pour en équilibrer la ligne éditoriale. Le disque Blum sert ainsi à préserver la diffusion d’autres disques qui pourront faire entrer des idées d’extrême droite dans des champs culturels ennemis45 45 Cette stratégie d’équilibrage est abordée en détail ici: THOMAS, 2020, p. 45-60. . Un disque de chants anarchistes enregistrés par les Quatre Barbus, un quatuor vocal réputé à gauche, illustre bien comment la Serp peut utiliser la fluidité médiale de ses disques d’équilibrage. Dans ses notes de pochettes écrites par Pierre Durand, on lit que:

Par une tragique ironie du sort, les anarchistes qui feront souvent le lit des communistes seront toujours leurs premières victimes. […] Le mouvement libertaire n’est ni de droite ni de gauche et [...] il a compté´ beaucoup d’adeptes dans d’autres eaux politiques. En effet, si l’anarchisme revendicateur est presque toujours à gauche, l’individualisme libertaire lui, de Barrès à Céline, a séduit bien des esprits politiquement à droite. Tout récemment encore, la ‘propagande par le fait’ a conquis des milieux réputés conservateurs et les bombes de l’OAS répondent en échos à celles des terroristes des années noires46 46 DURAND Pierre, Chansons anarchistes [Notes de pochette], Paris: Serp, 1969, disque microsillon 30 cm, HF20. .

Cette fois, Durand ne s’appuie pas sur des documents historiques, mais sur ces interprétations contemporaines de chants politiques appartenant à l’histoire pour diffuser auprès d’un public de gauche l’anticommunisme et le soutien à l’OAS typiques de l’extrême droite.

Ainsi, si l’histoire est toujours prise comme la clé universelle des espaces sociaux et culturels, elle est opérée à partir des différents niveaux de configuration et de publicisation des disques Serp et de leurs contenus. Le premier d’entre eux est la collection. Le catalogue Serp en présente deux qui le résument: Musique et chants et Hommes et faits du XXe siècle. La première est consacrée à la musique militaire, aux enregistrements anciens ou contemporains de chants politiques, ou à la musique sacrée. Les textes de présentation de ses disques mettent souvent en avant l’imaginaire des émotions universelles que suscite la musique. La seconde, qui nous intéresse plus particulièrement ici, est consacrée aux documents historiques sonores non-musicaux, sans exclure quelques enregistrements musicaux anciens. Son titre évoque des personnages et des actes nus, exposés tels qu’en eux-mêmes, et suggère donc une collection d’histoire sans parti pris. Les disques consacrés à l’AF ou à la vie politique de Doriot, du communisme à la collaboration, appartiennent à la collection Hommes et faits… et proposent en effet un programme documentaire pouvant servir de base à une historiographie usant notamment du son. Ils fonctionnent cependant comme un tract et un objet de mémoire. Dans le texte de pochette du premier, Pierre Pujo, fils de Maurice Pujo, fondateur en 1908 des Camelots du roi (le groupe d’action et de propagande de l’AF), écrit:

Car, à la différence de tant d’autres mouvements politiques disparus, l’Action française n’a pas fini de faire lever de nouvelles générations de royalistes qui, loin d’être découragés par les malheurs de la Patrie depuis le début du siècle, y voient la confirmation des leçons et des avertissements dispensés par Maurras. Elle demeure aujourd’hui une école de lucidité politique […]. Un hebdomadaire Aspects de la France, un mouvement, La Restauration Nationale, continuent sa lutte47 47 PUJO, Pierre, L’Action française [Notes de pochette]. Paris: Serp, 1967, disque microsillon 30 cm, HF17. .

Saint-Paulien, proche de Doriot, fait de son ancien compagnon un martyr politique trahi et un homme de haute valeur:

Le 22 février 1945, sur la route de Mengen sa voiture (aisément identifiable) fut mitraillée près de l’aérodrome militaire par deux avions qu’avant la première rafale Doriot avait identifié comme étant des appareils allemands. La deuxième rafale le foudroya. Ses obsèques furent imposantes48 48 SAINT-PAULIEN, Jacques Doriot [Notes de pochette], Paris: Serp, 1968, disque microsillon 30 cm, HF19. .

Le combat mené à travers la Serp pour revaloriser la mémoire d’hommes, de mouvements et de régimes d’extrême droite déchus doit prendre l’apparence de l’histoire pour toucher un public toujours plus large. Le document historique sonore est alors utile pour créer chez toutes et tous les souvenirs constitutifs de ces mémoires positives. À cette fin, il est placé au centre d’un régime d’écriture de l’histoire, qui, s’appuyant sur le mythe de la vérité phonographique et l’effet de réel du son enregistré, affirme l’impartialité des leçons politisées d’histoire et de l’expérience que proposent les disques Serp. Une publicité de 1965 présente un résumé clair et concis de ce régime:

L’histoire par le disque. Objectivité scrupuleuse, authenticité de la documentation sonore, puissance d’évocation, tels sont les trois caractères d’une collection sans équivalent, indispensable à l’amateur d’histoire, à l’homme cultivé et au discophile averti. ‘Hommes et faits du XXe siècle’. L’impartialité est la chasteté de l’histoire

(Fustel de Coulanges)49 49 L’Histoire par le disque, TV demain, Paris: n. 8, août 1965, p. 19. .

De part et d’autre de la documentation sonore «authentique» mais dont la fonction originelle, souvent de propagande, n’est jamais explicitée par les disques qui l’exploitent, on trouve donc l’«objectivité scrupuleuse» et la «puissance d’évocation». Dans le cas de l’objectivité, celle-ci est posée comme la conséquence directe et unique de l’«authenticité de la documentation sonore», comme le suggère cet extrait des notes de pochettes d’une anthologie en douze volumes de la Seconde Guerre mondiale: «Un seul parti pris a gouverné notre travail, celui de la vérité. Il nous a conduit à écarter impitoyablement toute reconstitution en studio, tout document douteux. Nous avons tendu de toutes nos forces vers ce qui nous paraît être l’essence de l’esprit scientifique: l’objectivité50 50 LE PEN, Jean-Marie, Histoire sonore de la Seconde Guerre mondiale: L’entre-deux guerres [Notes de pochette], Paris: Serp, 1972, disque microsillon 30 cm, HF32 1. ». Remarquons que l’objectivité sert ici de caution à une histoire politisée de la Seconde Guerre mondiale, qui devient même négationniste lorsqu’il s’agit d’évoquer brièvement la destruction des Juifs d’Europe sans la qualifier d’extermination ni mentionner l’usage des chambres à gaz, tout en accusant les troupes soviétiques:

L’horreur des camps de concentration allemands augmente d’intensité dans le chaos terminal du Reich, dans un pays lui-même ravagé et affamé. La terrible épidémie de typhus qui s’étend au rythme de l’invasion venue de l’est trouve des victimes désignées dans les camps surpeuplés de déportés faméliques. Des malheureux succombent aux transferts massifs des camps dans les pires conditions d’un exode inhumain. D’autres s’éteignent à l’aube de la liberté retrouvée51 51 LABURTHE, Jean-Claude, Histoire sonore de la Seconde Guerre mondiale: Les horreurs de la guerre [Notes de pochette], Paris: Serp, 1972, disque microsillon 30 cm, HF32 12. .

Deuxième pilier de la fluidité médiale du disque Serp, la «puissance d’évocation» désigne à la fois l’effet de réel du document historique et sa capacité à émouvoir. Or, toujours dans la perspective du mythe de la vérité phonographique, si le document sonore, utile en tant qu’il donne «à la connaissance [les] dimensions nouvelles […] de l’émotion, de la sensibilité52 52 Histoire d’Israёl [Notes de pochette], Paris: Serp, 1970, disque microsillon 30 cm, HF26. » est authentique, alors l’émotion qu’il provoquera le sera aussi: «Documents authentiques, ils conservent à vingt-cinq ans de distance une puissance d’émotion indicible53 53 LE PEN, Jean-Marie, La guerre d’Espagne [Notes de pochette], Paris: Serp, 1964, disque microsillon 30 cm, HF07. ». Une émotion que son authenticité peut rendre universelle, transcendant les espaces sociaux et culturels, semant peut-être les germes d’idéologies politiques honnies, voire illégales, là où elles pourraient croître puis se répandre.

Ce danger a été perçu par le juge et les associations de déportés et d’anciens Résistants qui attaquèrent la Serp et Jean-Marie Le Pen pour «apologie de crime de guerre». À l’été, l’entreprise avait commencé la publication d’une histoire sonore du IIIe Reich en quatre volumes. Le premier de ces disques, Le IIIe Reich – Voix de chants de la révolution allemande, est immédiatement attaqué (THOMAS, 2020THOMAS, Jonathan. La propagande par le disque. Jean-Marie Le Pen, éditeur phonographique. Paris: Éditions de l’EHESS, 2020. Doi: https://doi.org/10.4000/books.editionsehess.27508.
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, p. 134-144). En décembre 1968, Le Pen et la Serp sont reconnus coupables. Le disque est interdit. Le jugement est basé sur sa pochette, représentant Hitler en pleine gloire, sur ses notes de pochette, qualifiant l’arrivée au pouvoir du nazisme de «puissant mouvement de masse, somme toute populaire et démocratique54 54 Le IIIe Reich – Voix et chants de la révolution allemande [Notes de pochette], Paris: Serp, 1965, disque microsillon 30 cm, Serp 10I. », et sur son contenu sonore, des discours et des chants de propagande dont le choix et l’ordre ont «été manifestement organisés à la gloire du parti nazi et de ses méthodes55 55 17e chambre correctionnelle, Arrêts du Tribunal de grande instance de Paris, 18/12/1968, Jugement du procès intenté contre Jean-Marie Le Pen pour apologie de crime de guerre, versement 33W 553, Bibliothèque des archives de Paris, France. ». Le disque est reconnu comme dangereux pour une jeunesse qui n’a pas connu la guerre et se fascine pour la symbolique nazie, dont elle saisit mal le poids historique56 56 MERCIER, Jean-Maurice, Des attentats contre des cafés nord-africains aux souvenirs du nazisme, Le Monde, Paris: 24/11/1969. . Le disque Serp et sa configuration intermédiale sont donc jugés délictueux tôt dans l’histoire de l’entreprise. L’absence d’autres poursuites judiciaires visant les actes de publications de la Serp suggère que la stratégie d’équilibrage et de normalisation adoptée par Le Pen à la suite de ce procès fut efficace. Cela nous incite à penser que le jugement de 1968 n’a pas donné naissance à un appareil critique capable de démasquer systématiquement le disque politique sous le disque d’histoire, et d’enrayer sa fluidité médiale. Cette absence nous incite à penser que la communication sonore de l’histoire n’a pas fait l’objet d’une réflexion dédiée à en empêcher les manipulations politiques. En conclusion, il nous faut tirer des leçons critiques de cette médiation fluide des cultures politiques, par laquelle le disque et le son enregistré menacent parfois celles et ceux qui habitent les espaces où l’un fait entendre l’autre.

Conclusion

Dans le troisième chapitre qu’il consacre à l’histoire sonore, «Témoignages sonores enregistrés», Thévenot (1961)THéVENOT, Jean. Témoignages sonores enregistrés. In: SAMARAN, Charles (ed.). L’histoire et ses méthodes: recherche, conservation et critique des témoignages. Paris: Gallimard, 1961. propose une approche critique du document sonore visant principalement son authenticité. Il pointe les possibilités de montage, de recréation, de truquage de la date d’un document, qui pourraient abuser le travail historien. Terminant son propos, il achève d’intégrer le document sonore à ce travail en le soumettant au processus critique que requiert toute archive. Ce faisant, il prend aussi en compte la puissance communicationnelle du son:

[Quand] l’authenticité intégrale d’un document sonore aura été démontrée, l’historien devra encore le replacer dans son contexte, le soumettre à des recoupements avec les autres données à sa disposition, faire le départ entre ce que le fond et la forme de la parole peuvent avoir de subjectif et d’objectif, ne pas se laisser abuser par le charme ou les défauts d’une voix ou par les effets psycho-physiologiques dont sont capables les bruits et les ambiances sonores. Mais tout cela fait partie de son travail ordinaire. (THEVENOT, 1961THéVENOT, Jean. Les machines parlantes. In: SAMARAN, Charles (ed.). L’histoire et ses méthodes: recherche, conservation et critique des témoignages. Paris: Gallimard, 1961., p. 1416-1417)

Thévenot pose ainsi les bases d’un travail critique sur la conception et les usages de communications de l’histoire par le son, qu’il limite cependant à la recherche de l’authenticité du document sonore et à des soupçons sur les mauvais effets des émotions auditives (THEVENOT, 1961THéVENOT, Jean. Les machines parlantes. In: SAMARAN, Charles (ed.). L’histoire et ses méthodes: recherche, conservation et critique des témoignages. Paris: Gallimard, 1961., p. 1412-1414). Le cas de la Serp suggère de poursuivre cette réflexion, et d’y inclure déjà les pratiques de mise en système du document historique sonore avec les autres éléments qui composent finalement un récit historique. Nous proposons le terme «historiophonie» pour tenir compte de son développement, comme le terme «historiographie» sert déjà à le faire pour penser l’écriture littéraire de l’histoire.

Parce qu’ils ont existé comme médiateurs fluides de cultures politiques en jouant le rôle de passeurs d’histoire, les disques politiques évoqués dans cet article fournissent de premières bases à l’historiophonie esquissée ici. Leur capacité à médiatiser les reconstructions d’événements que sont les témoignages et les recréations ou les échantillons d’événements que sont les documents historiques sonores, comme des traces fiables et éloquentes de ces événements est remarquable. Elle implique bien sûr une critique portée sur ce que sont généralement les témoignages et les documents: des traces qui en disent autant sur ce, celui, ou celle qui les porte que sur l’événement à leur origine. Cette critique vise déjà à faire resurgir la médiation documentaire, qui, lors de la découverte du document, tend à être recouverte par la puissance d’évocation de la trace de l’événement. Quand il s’agît d’un document sonore, son examen critique doit d’abord considérer l’aspect technique de la médiation du son enregistré, et la façon dont elle impose sa mise en forme aux sons de l’histoire. Cette mise en forme est autant le produit d’un dispositif technique possédant des qualités et des limites particulières, que d’une chaine de choix par lesquels on cherche à réaliser, tant bien que mal, une intention d’agir. Ainsi, un premier champ d’investigation historiophonique se présente dans une recherche sur les conditions de réalisation d’un document sonore, mise en perspective avec l’empreinte que la technologie laisse sur le son capté d’un événement. Un deuxième champ s’ouvre sur la socialisation des dispositifs techniques, notamment s’agissant de leur puissance reproduction, de duplication et d’amplification. Un troisième s’ouvre, toujours sur l’empreinte de la technologie sur le son, plus spécifiquement sur les pratiques de manipulation du son enregistré. Il peut alors s’agir, par exemple, d’un montage, produisant un document inauthentique à partir de documents authentiques, ou d’actions sur les fréquences, visant à rendre le son plus captivant, plus séduisant, plus émouvant, plus convaincant.

Plus cette médiation technique sera précise, plus le son sera riche en informations, plus il sera intelligible et provocateur d’une fausse expérience de l’histoire, plus un auditoire pourra le recevoir comme la trace véritative d’un événement. Son support aura ainsi plus de chances de devenir un médiateur fluide des signes culturels qu’il porte et de servir une volonté politique. Cette chance est démultipliée si le support choisi offre la possibilité, comme la pochette du disque microsillon 30 cm, d’accompagner le récit historique sonore de textes écrits et d’images visuelles. C’est également le cas lorsque la présentation sonore d’un événement est massivement diffusée par un support rapide et peu coûteux à produire tel que, à partir des années 1970 en France, la cassette audio, qui se prête par ailleurs à une écoute plus fréquente car nomade.

Ces pistes basiques pour la constitution d’une historiophonie sont avant tout le produit d’une recherche menée sur des objets du passé qui ont perdu de leur actualité, bien que certains d’entre eux, comme les disques Serp, continuent de circuler sur des sites de vente en ligne. Néanmoins, elles s’attachent à analyser les conséquences sociales de l’enregistrement, cette capacité technique portant sur la plupart des aspects des perceptions humaines et machiniques du réel. Ainsi, les réflexions et les enquêtes menées pour reconnaître ou éviter les caractères politiques des histoires sonores pourraient être transposées (et inversement) à tous types de matériaux enregistrés utilisés par des volontés de communication politique fluide. Elles pourraient également servir à diffuser un appareil critique qui participerait à déconstruire les manipulations enregistrées et rendrait leur fluidité inutile. En somme, elles tireraient d’une histoire, celle de la socialisation de ce son enregistré omniprésent et parfois négligé, de quoi mieux combattre des intentions politiques envahissantes et parfois destructrices.

Organizadores do Dossiê História e Culturas Sonoras

  • Virgínia de Almeida Bessa
    Juliana Pérez González
    Cacá Machado
    José Geraldo Vinci de Moraes
  • 1
    Article non publié sur une plateforme de prépublication – preprint. Tous les enregistrements mentionnés dans l’article peuvent être écoutés à cette adresse : http://www.memoriadamusica.com.br/site/index.php/texto-e-audio/29-texto-e-audio/dossie-historia-e-culturas-sonoras/499-retrato-do-disco-como-mediador-fluido-das-culturas-politicas-jonathan-thomas
  • 3
    Les informations sur les disques présentés ici sont rassemblées dans la base de données PS.xx – La propagande sonore enregistrée au XXe siècle, répertoriant les supports produits pour la propagande politique en France au 20e siècle. Voir: https://didomena.ehess.fr/collections/st74cw33j?locale=fr. PS.xx est soutenue par la Région Ile-de-France dans le cadre du Domaine d’intérêt majeur Patrimoines matériels, expérimentation, innovation et résilience.
  • 4
    Le phonographe socialiste, l’Humanité, Paris, 23/11/1909, p. 4; Les chants royalistes, L’Action Française, Paris: 19/05/1910, p. 1.
  • 5
    Se reporter aux catalogues Piatiletka, Disques Hébertot, Unitélédis, Uni/Ci/Té et Serp présentés dans la base de données PS.xx – La propagande sonore enregistrée au XXe siècle.
  • 6
    Pendant l’entre-deux-guerres, la parole politique est exclue des ondes françaises, contrôlées par un monopole d’État, jusqu’à la campagne des élections législatives de 1936 (MÉADEL, 1994MÉADEL, Cécile. Histoire de la radio des années trente. Du sans-filiste à l’auditeur. Paris: Anthropos; I.N.A., 1994., p. 13). Après-guerre, l’accès aux médias de masse est perçu par certaines organisations politiques comme réservé à celles qui exercent déjà le pouvoir. Sur la pochette d’un disque communiste de 1978, on peut lire: «Pourquoi un disque: Aujourd’hui, il est de plus en plus difficile aux citoyens de se réunir pour discuter: les horaires, la fatigue, etc., en sont les causes principales. La radio et la télé font le reste, mais elles sont surtout un instrument des candidats de la majorité. Face à ses puissants moyens modernes, les communistes de la 2e circonscription du Vaucluse ont pensé que le disque, modeste moyen moderne, vous permettrait au moins d’entendre leurs candidats. Bonne écoute !» (LIOTAUD, François, Entretien avec François Liotaud, candidat du Parti communiste français, Bagnolet: Uni/Ci/Té, 1978, disque microsillon 17 cm). Les disques politiques français des années 1930 ont été mentionnés dans au moins deux ouvrages sur le Front populaire (ORY, 2016ORY, Pascal. La Belle illusion. Culture et politique sous le signe du Front Populaire, 1935-1938. Paris: CNRS Éditions, 2016 [1994]. [1994], p. 303; BASILE, CORDEREIX, 1997BASILE, Giusy; CORDEREIX, Pascal. Le disque. In: LEFEBVRE, Denis; LEFEBVRE, Rémi (éd.). Mémoires du Front Populaire. Paris: OURS/Bruno Leprince, 1997., p. 96). Récemment, une thèse a été soutenue (THOMAS, 2021THOMAS, Jonathan. Le disque politique en France (1929-1939). Thèse de doctorat, Musique, Histoire, Société. École des Hautes Etudes en Sciences Sociales, Paris, 2021.), et des chercheurs ont commencé à investiguer cet objet (BOULLAND, 2018BOULLAND, Paul. La propagande par le disque. Usages militants du vinyle dans les années 1960 et 1970, des campagnes électorales au soutien aux grèves, communication présentée au 2e congrès de la Société pour l’Histoire des Médias. Rêver d’un autre monde. Médias, utopies et expérimentations. Paris: Université Paris 2, 25 mai 2018.).
  • 7
    GIFFARD, Pierre, Le Phonographe expliqué à tout le monde. Edison et ses inventions, Paris: Maurice Dreyfous, 1878, p. 34-35GIFFARD, Pierre. Le phonographe expliqué à tout le monde. Edison et ses inventions. Paris: Maurice Dreyfous, 1878..
  • 8
    Par exemple, le Front national a distribué plusieurs centaines de milliers de cassettes audio pour la campagne des élections européennes de 1994 (THOMAS, 2020THOMAS, Jonathan. La propagande par le disque. Jean-Marie Le Pen, éditeur phonographique. Paris: Éditions de l’EHESS, 2020. Doi: https://doi.org/10.4000/books.editionsehess.27508.
    https://doi.org/10.4000/books.editionseh...
    , p. 70-73).
  • 9
    En tant qu’il est “véritatif”, un «relevé véritatif du réel” forme, exprime et impose une vérité incontestable du réel. Il extrait et donne la vérité essentielle du réel tout en y imprimant sa forme, ce qui est paradoxal. En ce sens, il fixe et efface dans un même mouvement les conditions de production de la vérité du réel. Il crée ainsi une représentation relative du réel, mais la fait passer pour absolue.
  • 10
    Cette représentation du phonographe comme médiateur sans médiation est également à la racine d’un imaginaire non plus scientifique, mais magique de la machine (GIULIANI, 2009GIULIANI, Élizabeth. La Réception du média, Revue de la BNF, Paris, Bibliothèque Nationale de France, v. 3, n. 33, p. 9-19, 2009. Doi: https://doi.org/10.3917/rbnf.033.0009.
    https://doi.org/10.3917/rbnf.033.0009...
    ). Voir également plus bas dans ce paragraphe.
  • 11
    Déconcertant et sublime, Le Radical, Paris, 29/04/1900, p. 4. Disponible sur https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k7612576m Consulté le 11 août 2023.
  • 12
    H.V., Déposition d’un témoin auriculaire, L’Intransigeant, Paris, 20/05/1894, p. 2.
  • 13
    Ce débat est très présent dans la seconde moitié des années 1920, alors que l’enregistrement et la diffusion du son s’électrifient. Voir ADORNO, Théodore, Circonvolutions d’aiguille, Beaux passages, traduit de l’allemand [Nadelkurven] par Jean Lauxerois, Paris: Payot & Rivages, 2013 [1927], p. 215-220ADORNO, Théodore. Circonvolutions d’aiguille, Beaux passages. Traduit de l’allemand [Nadelkurven] par Jean Lauxerois. Paris: Payot & Rivages, 2013 [1927].; CŒUROY, André, CLARENCE, Geneviève, Le Phonographe, Paris: Kra, 1929; TOURNEL, E., L’Utilisation actuelle du phonographe par la bourgeoisie, l’Humanité, 11/05/1927, p. 4CŒUROY, André; CLARENCE, Geneviève. Le phonographe. Paris: Kra, 1929..
  • 14
    L’Abbé aux phonographes, La Lanterne, Paris, 16/04/1902, p. 1.
  • 15
    À propos de l’esthétisation de la politique par la propagande, voir TCHAKHOTINE, 1952TCHAKHOTINE, Serge. Le viol des foules par la propagande politique. Paris: Gallimard, 1952 [1939]. [1939].
  • 16
    HERRIOT, Édouard, Discours prononcé par M. Édouard Herriot au banquet de Lyon du 12 avril 1932, Lyon: Polydor, 1932, 6 disques à aiguille 30 cm, 516.533 à 516.538HERRIOT, Édouard. Discours prononcé par M. Édouard Herriot au banquet de Lyon du 12 avril 1932. Lyon: Polydor, 1932, 6 disques à aiguille 30 cm, 516.533 à 516.538.; TARDIEU, André, Discours prononcé le 6 avril 1932, Paris: Polydor, 1932, 7 disques à aiguille 30 cm, 516.526 à 516.532TARDIEU, André. Discours prononcé le 6 avril 1932. Paris: Polydor, 1932, 7 disques à aiguille 30 cm, 516.526 à 516.532..
  • 17
    Le phonographe socialiste, l’Humanité, Paris, 23/11/1909, p. 1.
  • 18
    LONGUET, Jean, La Propagande par la chanson, Le Populaire, Paris, 13/12/1930, p. 1LONGUET, Jean. La Propagande par la chanson, Le Populaire, Paris, 13/12/1930, p. 1..
  • 19
    Pedro, Les Disques des ‘Chants du Monde du Travail’, Le Populaire, Paris, 31/07/1930, p. 4PEDRO. Les Disques des ‘Chants du Monde du Travail’, Le Populaire, Paris, 31/07/1930, p. 4..
  • 20
    DESNOS, Robert, Les Disques, Ce Soir, Paris, 19/04/1938, p. 4.DESNOS, Robert. Les Disques, Ce Soir, Paris, 19/04/1938, p. 4.
  • 21
    FRANCOTTE, Robert, Une conférence sur les chants du folklore, L’Art Musical Populaire, Paris, 03/1939, p. 4FRANCOTTE, Robert. Une conférence sur les chants du folklore, L’Art Musical Populaire, Paris, 03/1939, p. 4..
  • 22
    GOLESTAN, Stan, Concerts et récitals, Le Figaro, Paris, 18/04/1938, p. 6GOLESTAN, Stan. Concerts et récitals, Le Figaro, Paris, 18/04/1938, p. 6..
  • 23
    Contrairement à la radio, le disque n’est pas un média du direct, et Compère Morel sent son manque d’actualité (Compére-Morel a fait une causerie sur ‘le Journal moderne’ hier soir à ‘Radio-Populaire’, Le Populaire, Paris, 01/12/1932, p. 3). Sur le disque comme objet d’avant-garde, voir Le Populaire, Paris, 13/05/1931, p. 5.
  • 24
    ‘La Voix des Nôtres’ et la critique, Le Populaire, Paris, 12/03/1930, p. 1.
  • 25
    La ‘Voix des Nôtres’ devant la critique, Le Populaire, 5/06/1930, p. 4.
  • 26
    RENAUDEL, Pierre, L’Assassinat de Jaurès, Paris: Ersa, 1930, disque à aiguille 25 cm, 101RENAUDEL, Pierre. L’Assassinat de Jaurès. Paris: Ersa, 1930, disque à aiguille 25 cm, 101; COMPÈRE-MOREL, Adéodat, Jules Guesde sur son lit de mort, Paris: Ersa, 1930COMPÈRE-MOREL, Adéodat. Jules Guesde sur son lit de mort. Paris: Ersa, 1930, disque à aiguille 25 cm, 102., disque à aiguille 25 cm, 102 (5002) (Écoute 1Écoute 1. Jules Guesde sur son lit de mort. Ses dernières paroles, recueillies par Compère-Morel. Disque ERSA n° 102 (5003), 1930. Disponible sur : http://www.phonobase.org/11049.html.
    http://www.phonobase.org/11049.html...
    . Disponible sur: http://www.phonobase.org/11049.html). COMPÈRE-MOREL, Adéodat, Une belle page de Guesde, Paris: Ersa, 1930, disque à aiguille 25 cm, 102 (5003)COMPÈRE-MOREL, Adéodat. Jules Guesde sur son lit de mort. Paris: Ersa, 1930, disque à aiguille 25 cm, 102. (Écoute 2Écoute 2. Une belle page de Guesde, lue au micro par Compère-Morel. Disque ERSA n° 102 (5003), 1930. Disponible sur : http://www.phonobase.org/11050.html.
    http://www.phonobase.org/11050.html...
    . Disponible sur: http://www.phonobase.org/11050.html).
  • 27
    ‘La Voix des Nôtres’ et la critique, Le Populaire, Paris, 12/03/1930, p. 1.
  • 28
    La ‘Voix des Nôtres’ devant la critique, Le Populaire, Paris, 5/06/1930, p. 4.
  • 29
    ‘La Voix des Nôtres’ et la critique, Le Populaire, Paris, 12/03/1930, p. 1.
  • 30
    COLIN, Georges, Testament de Louis XVI, Paris: Disques Hébertot, 1932COLIN, Georges. Testament de Louis XVI – Dernière lettre de la Reine Marie-Antoinette à Madame Elisabeth. Paris: Disques Hébertot, 1932, disque à aiguille 30 cm, EY-4.003, disque à aiguille 30 cm, EY-4.003, Face A (Écoute 3Écoute 3. Testament de Louis XVI, par M. George Colin. Disque Hébetot EY-4003 (Face A), 1932. Disponible sur : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1082253t/f1.media.
    https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1...
    . Disponible sur: https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1082253t/f1.media); COLIN, Georges, Dernière lettre de la Reine Marie-Antoinette à Madame Elisabeth, Paris: Disques Hébertot, 1932COLIN, Georges. Testament de Louis XVI – Dernière lettre de la Reine Marie-Antoinette à Madame Elisabeth. Paris: Disques Hébertot, 1932, disque à aiguille 30 cm, EY-4.003, disque à aiguille 30 cm, EY-4.003, Face B (Écoute 4Écoute 4. Dernière lettre de la Reine Marie-Antoinette à Madame Élisabeth, par M. George Colin. Disque Hébetot EY-4003 (Face B), 1932. Disponible sur : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1082253t/f2.media.
    https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1...
    . Disponible sur: https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1082253t/f2.media). COLIN, Georges, Le Procès de Louis XVI: I. L’interrogatoire, Paris: Disques Hébertot, 1932COLIN, Georges. Testament de Louis XVI – Dernière lettre de la Reine Marie-Antoinette à Madame Elisabeth. Paris: Disques Hébertot, 1932, disque à aiguille 30 cm, EY-4.003, disque à aiguille 30 cm, EY-4.004, Face A (Écoute 5Écoute 5. Le Procès de Louis XVI, par M. George Colin. Disque Hébertot EY-4.004 (Face A). 1932, Disponible sur : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k10822458/f1.media
    https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1...
    . Disponible sur: https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k10822458/f1.media). COLIN, Georges, Le Procès de Louis XVI: II. Plaidoirie de De Sèze, Paris: Disques Hébertot, 1932COLIN, Georges. Testament de Louis XVI – Dernière lettre de la Reine Marie-Antoinette à Madame Elisabeth. Paris: Disques Hébertot, 1932, disque à aiguille 30 cm, EY-4.003, disque à aiguille 30 cm, EY-4.004, Face B (Écoute 6Écoute 6. Plaidoirie de Sèze, par M. George Colin. Disque Hébertot, EY-4.004 (Face B), 1932. Disponible sur : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k10822458/f2.media.
    https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1...
    . Disponible sur: https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k10822458/f2.media).
  • 31
    SORDET, Dominique, En marge du Grand Prix, Candide, Paris, 6/04/1933, p. 15SORDET, Dominique. En marge du Grand Prix, Candide, Paris, 6/04/1933, p. 15..
  • 32
    DAUDET, Léon, La Propagande par le disque, L’Action Française, Paris, 20/06/1932, p. 1DAUDET, Léon. La Propagande par le disque, L’Action Française, Paris, 20/06/1932, p. 1..
  • 33
    SORDET, Dominique, Le phonographe, L’Action Française, Paris, 10/12/1932, p. 4SORDET, Dominique. Le phonographe, L’Action Française, Paris, 10/12/1932, p. 4..
  • 34
    SORDET, Dominique, Échos du royaume de France, L’Action Française, Paris, 24/06/1932, p. 4SORDET, Dominique. Échos du royaume de France, L’Action Française, Paris, 24/06/1932, p. 4..
  • 35
    PAGÈS, Y.; PAGÈS, A., Disques et phonos, Brochure d’Éducation Nouvelle Populaire, Paris, 12/1938, n. 13, p. 11PAGÈS, Y.; PAGÈS, A. Disques et phonos, Brochure d’Éducation Nouvelle Populaire, Paris, 12/1938, n. 13, p. 11..
  • 36
    Reprenant puis développant son activité après la guerre, Le Chant du Monde est pour sa part un exemple remarquable de propagande par le disque de musique (ALTEN, 2012ALTEN, Michèle. Le chant du monde: une firme discographique au service du progressisme (1945-1980), ILCEA [En ligne], v. 16, 2012. Doi: https://doi.org/10.4000/ilcea.1411.
    https://doi.org/10.4000/ilcea.1411...
    ).
  • 37
    L’histoire vivante à l’heure de la Page sonore, Spécial Sonore, Paris: n. 3, mai-juin 1964, p.1.
  • 38
    Ce paragraphe et le suivant évoquent l’histoire de la Serp en s’appuyant sur BRESSON & LIONET, 1994BRESSON, Gilles; LIONET, Christian. Le Pen. Biographi. Paris: Seuil, 1994..
  • 39
    L’enregistrement d’un procès est alors interdit en France. Le disque évoqué est: TIXIER-VIGNANCOUR, Jean-Louis, Plaidoirie pour Salan, Paris: La Voix de l’Auteur, 1962TIXIER-VIGNANCOUR, Jean-Louis. Plaidoirie pour Salan. Paris: La Voix de l’Auteur, 1962, disque microsillon 30 cm, LVA 1001/2., disque microsillon 30 cm, LVA 1001/2. Voir THOMAS, 2020THOMAS, Jonathan. La propagande par le disque. Jean-Marie Le Pen, éditeur phonographique. Paris: Éditions de l’EHESS, 2020. Doi: https://doi.org/10.4000/books.editionsehess.27508.
    https://doi.org/10.4000/books.editionseh...
    , p. 15-16.
  • 40
    Le Pen a quitté la direction de la Serp au milieu des années 1980. Il a été remplacé par Paul Robert, qui en 1992 a cédé sa place à Marie-Caroline Le Pen, la fille aînée de Jean-Marie Le Pen. Sous sa direction et celle de Robert, la Serp délaisse les disques d’histoire et met en avant les musiques militaires, les chansons traditionnelles, les musiques sacrées et les chants politiques contemporaines promouvant le nationalisme, le racisme, le royalisme ou le FN. La Serp a disparu en 2000 après une dispute politico-familiale entre le premier patron de la Serp et sa fille.
  • 41
    Ce livre, qui explore les musiques circulant dans l’extrême droite française, est lui-aussi marqué à l’extrême droite.
  • 42
    Écouter par exemple: BLUM, Léon; BASCH, Victor, Rassemblement populaire du 14 juillet 1936, Paris: Ligue des droits de l’homme et du citoyen, 6 disques à aiguille 25 cmBLUM, Léon; BASCH, Victor. Rassemblement populaire du 14 juillet 1936. Paris: Ligue des Droits de L’Homme et du Citoyen, 1936, 6 disques à aiguille 25 cm. Consultable en ligne: https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1081535m. Consulté le 30/06/2022.
    https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1...
    . Consultable en ligne: https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1081535m, consulté le 30/06/2022.
  • 43
    Le disque mentionné est: Collectif, Histoire d’Israël: Voix et chants, Paris: Serp, 1970, disque microsillon 30 cm, HF26.
  • 44
    BLUM, Léon; DURAND, Pierre, Léon Blum: Discours politiques, Paris: Serp, 1971BLUM, Léon; DURAND Pierre. Léon Blum: discours politiques. Paris: Serp, 1971, 2 disques microsillon 30 cm, HF31., 2 disques microsillon 30 cm, HF31; Collectif, L’Action française: Voix et chants, Serp, 1967, disque microsillon 30 cm, HF16; Collectif, Jacques Doriot: Discours, allocutions, chants Serp, 1968, disque microsillon 30 cm, HF19.
  • 45
    Cette stratégie d’équilibrage est abordée en détail ici: THOMAS, 2020THOMAS, Jonathan. La propagande par le disque. Jean-Marie Le Pen, éditeur phonographique. Paris: Éditions de l’EHESS, 2020. Doi: https://doi.org/10.4000/books.editionsehess.27508.
    https://doi.org/10.4000/books.editionseh...
    , p. 45-60.
  • 46
    DURAND Pierre, Chansons anarchistes [Notes de pochette], Paris: Serp, 1969DURAND Pierre. Chansons anarchistes [Notes de pochette]. Paris: Serp, 1969, disque microsillon 30 cm, HF20., disque microsillon 30 cm, HF20.
  • 47
    PUJO, Pierre, L’Action française [Notes de pochette]. Paris: Serp, 1967, disque microsillon 30 cm, HF17PUJO, Pierre. L’Action française [Notes de pochette]. Paris: Serp, 1967, disque microsillon 30 cm, HF17..
  • 48
    SAINT-PAULIEN, Jacques Doriot [Notes de pochette], Paris: Serp, 1968, disque microsillon 30 cm, HF19SAINT-PAULIEN. Jacques Doriot [Notes de pochette]. Paris: Serp, 1968, disque microsillon 30 cm, HF19..
  • 49
    L’Histoire par le disque, TV demain, Paris: n. 8, août 1965, p. 19.
  • 50
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Edited by

Rédacteurs Responsables

Miguel Palmeira et Stella Maris Scatena Franco

Publication Dates

  • Publication in this collection
    22 Dec 2023
  • Date of issue
    2023

History

  • Received
    06 July 2022
  • Accepted
    14 Feb 2023
Universidade de São Paulo, Faculdade de Filosofia, Letras e Ciências Humanas, Departamento de História Av. Prof. Lineu Prestes, 338, 01305-000 São Paulo/SP Brasil, Tel.: (55 11) 3091-3701 - São Paulo - SP - Brazil
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